-
Le chien jaune, George SIMENON
Vendredi 7 novembre.
Concarneau est désert. L'horloge lumineuse de la vieille ville, qu'on aperçoit au-dessus des remparts, marque onze heures moins cinq. C'est le plein de la marée et une tempête du sud-ouest fait s'entrechoquer les barques dans le port. Le vent dans les rues, où l'on voit parfois des bouts de papier filer à toute allure au ras du sol. Quai l'Aiguillon, il n'y a pas une lumière. Tout est fermé. Tout le monde dort.
Seules les trois fenêtres de l'Amiral, à l'angle de la place et du quai, sont encore éclairées.Mon avis :
Paru en 1931, Le chien jaune est un des premiers Maigret que j’ai lu. C’est aussi celui dont je donne le plus d’extraits à lire à mes élèves, à commencer par les deux premières pages qui campent merveilleusement le décor, en décrivant Concarneau la nuit. Tout le génie de Simenon, toute la maîtrise de ses descriptions se retrouvent dans ces deux pages.
Ce roman nous relate les meurtres, disparition, tentative de meurtre qui viennent troubler la bonne ville de Concarneau et attirent sur place une foule de journalistes et de curieux. Le mystère plane sur ces affaires ainsi que sur un étrange chien jaune qui aurait été aperçu, errant sur les lieux de chaque meurtre. Appartiendrait-il au coupable ?
Maigret, qui est encore un jeune commissaire, a flairé dès son arrivée à Concarneau que la fille de salle de l’Hôtel de l’Amiral était bien placée pour enregistrer les allées et venues de chacun. Peu enclin à utiliser les techniques policières modernes, il se fie à son instinct et à son don d’observation. Une fois les indices réunis, il va provoquer, comme à son habitude, une confrontation générale qui mettra ainsi au grand jour une sombre affaire que chacun croyait oubliée et qui est la cause de tous ces maux.
Une fois de plus, Simenon construit son récit policier avec un point de vue réaliste qui permet au lecteur d’exercer ses talents de raisonnement sur les événements qui lui sont dévoilés. Le cadre spatio-temporel est particulièrement bien décrit et permet de situer clairement l’action dans le contexte des années trente. Concarneau, ville portuaire essuyant une tempête, va servir de toile de fond à l’action. La tempête est aussi emblématique du monde agité et peu reluisant dans lequel le commissaire va pénétrer pour mener son enquête. Il est à noter que le soleil ne fera son apparition qu’une fois l’affaire résolue.
Enfin, fidèle à lui-même, Simenon oppose deux univers sociaux caractéristiques de son époque : « les petites gens » et la bourgeoisie de province ; chaque personnage étant caractérisé en fonction de son appartenance, son discours renforce encore cet antagonisme.
Un Maigret classique, dans le pur style Simenon, à découvrir ou à redécouvrir.
Tags : Le chien jaune, roman policier, Concarneau, le mois belge, Simenon
-
Commentaires
J'aurais bien aimé avoir une prof qui nous donnait des extraits de Simenon mais à notre époque ce n'était pas le cas.J'adore les Maigret, il fut un été où je les ai tous lus l'un à la suite de l'autre. Le chien jaune est pour ma part l'un de mes favoris.
3Jacqueline HSamedi 5 Avril 2014 à 08:58Ah Simenon, un de mes auteurs de prédilection, tes élèves ont de la chance de le lire en classe. Je me souviendrai toujours de mes profs de français de collège, elles ont largement contribué de par leur enthousiasme à mon amour pour la lecture. Très bon week-end à toi.
Merci pour vos gentils commentaires. Ce livre se prête magnifiquement à l'analyse pour découvrir les caractéristiques du genre. Je leur fais dessiner Concarneau d'après les premières pages. Les résultats sont souvent très proches de la réalité tant Simenon est précis.
Ah Simenon ! Je me dis régulièrement que je devrais m'offrir une lecture intégrale . Hélas, je crains de devoir attendre ma mise à la pension pour en trouver le temps . Ceci dit, en première Humanités, nous avions aussi droit à un "cours lecture", mais c'était Exbrayat qui avait les faveurs de notre professeur.
L'atmosphère de Simenon est sombre. Ses intrigues mettent en scène des petits bourgeois sans ambition, des petites gens en difficultés financières... Je ne vous conseillerai pas d'en lire dix d'affilée. Mais celui-ci, comme Les fiançailles de Mr Hire, Le chat, Les fantômes du chapelier, Le pendu de St Pholien..., vaut la peine d'être lu.
10NadègeMercredi 9 Avril 2014 à 10:22Eh bien, moi, on me l'a fait lire pour l'école... et ça reste un de mes pires souvenirs d'ennui de lecture... Comme quoi, les goûts et les couleurs :-) Je ne parviens vraiment pas à accrocher à l'univers de Simenon ! Il n'y a rien à faire... :-(
11somaja1Vendredi 2 Mai 2014 à 14:16Je viens de lire mon 1er Maigret grâce au mois belge.... il n'est jamais trop tard. Je n'ai pas été plus emballée que ça par Maigret voyage, mais peut-être y en a t-il des meilleurs, celui-là peut-être.
Anne me dit que tu es la spécialiste de Simenon, et je me demandais s'il y avait des Maigret qui se passent en Belgique. Parce que pour tout dire, j'aurais aimé un peu plus de belgitude dans ce que j'ai lu. Alors ? ça existe ?
Il y a "Le pendu de St Pholien" qui se passe à Liège ainsi que "La danseuse du Gai Moulin" et "Le témoignage d'un enfant de chœur". "Le bourgmestre de Furnes" à Furnes ! Mais ce n'est pas mon préféré (lent et sombre)
"Maigret chez les Flamands", "Maigret et l'inspecteur cadavre" (dans le Hainaut) Je n'en vois pas d'autres.13somaja1Samedi 3 Mai 2014 à 22:25
Ajouter un commentaire
Après "La souris bleue", "Le chien jaune", tu restes dans les animaux aux couleurs bizarres.
Je te le rajoute pour mon challenge.
Profite bien de ce congé. Après, ce sera la dernière ligne droite.