• Le héron de Guernica, Antoine CHOPLIN

     

    Le héron de Guernica, Antoine CHOPLINAvril 1937, le bombardement de Guernica fournit à Picasso le sujet de sa plus célèbre toile. A l’opposé du travail du Maitre, Basilio, jeune peintre autodidacte, s’absorbe dans l’observation des hérons qui hantent les marais des alentours… Alors que l’aviation allemande réduit la ville en cendres, il tente, par son art, de saisir la dignité et la fragilité de l’oiseau au milieu de cette folie. 

    Mon avis : 

    Basilio tente avec patience de rendre au mieux sur la toile, la finesse des plumes chatoyantes du héron, la lumière qui danse dans son œil, le port altier de l’échassier… Ce 26 avril 1937, il est en train de peindre quand le ciel s’emplit du ronronnement des moteurs et s’obscurcit au passage des trente-trois bombardiers qui s’apprêtent à lâcher sur Guernica, sa ville, plus de 2500 bombes incendiaires. Il court alors vers la place où se tient le marché, inquiet pour son oncle et ceux qu’il y a laissés mais quand il arrive, il découvre un paysage dévasté. Pendant qu’il s’occupe des blessés, le prêtre Eusébio lui confie un appareil photo et lui demande de conserver ainsi le souvenir de ce jour funeste pour que l’on sache ailleurs, qu’on se rende compte de la folie meurtrière des hommes. Avec son regard d’artiste, il va donner corps à cette tragédie, photographiant les avions lâchant leurs bombes à l’aveugle, un vélo abandonné, des humains en déroute, la violence et la souffrance.
    Deux mois plus tard, le prêtre lui confie que Picasso, dont il n’a jamais entendu parler, expose à Paris une toile qui commémore le massacre. Il invite Basilio à le rencontrer pour lui montrer ses toiles. Ce grand maitre les comprendra sûrement. 

    Ce court roman tout en finesse décrit le bombardement de Guernica à travers les yeux de Basilio et aussi son travail de peinture. Naïf, se contentant de joies simples, il s’acharne à reproduire l’authenticité de ce qu’il voit et exclusivement les hérons cendrés. Il est touchant de pureté et attachant par le regard plein de bonté qu’il pose sur les gens et les faits. Le personnage de Basilio pose aussi la question de la difficulté à restituer avec justesse par l’art, la véracité des choses, que ce soit le plumage d’un oiseau ou l’horreur d’une ville en flamme. L’art peut-il rendre tout ça ? 

    Il est presque cruel de voir que ce n’est pas au jeune artiste local, ayant vécu l’événement de près que l’on a demandé de témoigner du bombardement mais bien au « maître », dont l’œuvre « Guernica » marquera l’Histoire à jamais.  

    J’ai aimé ce roman délicat constitué de courts chapitres ; cette écriture concise et poétique qui peu à peu constitue le tableau final. J’ai apprécié la manière dont il donne à voir la ville avant et pendant l’horreur, en touches impressionnistes : un taureau qui fume, un cheval calciné, une roue de vélo qui tourne, des hommes affolés… Une histoire remplie d’humanité et de sagesse.

    Quatre-vingt ans après les faits, ce récit reste hélas d’actualité.

     

     

     

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  • Commentaires

    1
    Lundi 11 Décembre 2017 à 13:01

    Oh je le note, j'aime tellement la plume de cette auteur. Je suis en train de lire "Incendie", j'aime beaucoup. Merci pour ton beau billet.,

      • Lundi 11 Décembre 2017 à 22:39

        Je note celui-là. Il me tarde de retrouver cette plume qui m'a séduite.

    2
    Lundi 11 Décembre 2017 à 15:28
    Marion

    Oh oui, le taureau qui fume ! Cette scène est sublime. J'ai découvert cet auteur et ce titre il y a seulement quelques mois. Je me souviens d'avoir écrit un minuscule billet ensuite, ne parvenant pas à trouver les mots tant l'émotion était forte. 

      • Lundi 11 Décembre 2017 à 22:41

        Je vais aller le lire.

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