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Madame, vous êtes une prof de merde, Charlotte CHARPOT
Jeune enseignante, Charlotte Charpot est parachutée pour sa première affectation dans la banlieue de Nîmes. Rien ne lui sera épargné : élèves insolents, enfants battus, caillassage de voiture et indifférence de sa hiérarchie. Mutée à Bruxelles, la voilà plongée dans la réalité du « flexiprof » qui enseigne le français, l’histoire, la géo et pourquoi pas les claquettes, si le directeur l’exige, au milieu des insultes proférées aussi bien par les élèves que par les parents.
Mon avis :
Ce livre est paru en 2009 en Belgique mais il vient enfin de sortir en poche et cela donnera l’occasion aux Français de le lire car à sa sortie, il a été quelque peu censuré par leurs médias.
Ce livre raconte sans langue de bois, de manière crue souvent, le parcours de cette jeune femme dans l’enseignement, en France puis en Belgique.
Il révèle sans faux semblant les difficultés à enseigner dans certaines écoles ghetto de banlieue ou de quartiers difficiles. Violence physique, violence morale, injures, manque d’encadrement… le tableau est noir, très noir.
L’auteur a écrit ce livre comme un appel à l’aide, non pour elle car elle a quitté l’enseignement, mais pour les profs qui vivent cela au quotidien. Ce pavé dans la marre, elle l’a jeté volontairement pour que l’on sache, que l’on comprenne, que tout cela n’est jamais dit ouvertement, jamais, ou si peu, évoqué par la presse et le public qui préfèrent dénigrer les enseignants, les stigmatiser pour leurs nombreux congés, les montrer du doigt pour les piètres résultats des élèves aux différentes épreuves européennes d’évaluation.
Ce livre fait peur. Le quotidien raconté ici est effarant. Par moment, on se croirait dans un récit d’Huysmans ou Zola. Et je regrette que cela soit si noir car cela frise parfois la caricature. Je sais cependant que des écoles difficiles, cela existe, ainsi que des violences envers les profs et je compatis sincèrement. Mais bien qu’enseignant dans le qualifiant, je n’ai jamais vécu ce qui est décrit ici. Il faut donc éviter de généraliser la situation.
Bien sûr, certains élèves sont difficiles, bien sûr certains sont grossiers, violents, agressifs… Ils sont à l’image de l’ensemble de la société.
Ce que je regrette dans cet ouvrage c’est qu’il ne fait que poser des faits. Les dysfonctionnements évoqués ne me semblent pas tous s’appuyer sur des sources vérifiables et sérieuses. Beaucoup de choses restent vagues. Il y a aussi des erreurs et des interprétations quant à la présentation du système (complexe) scolaire belge. Ce n’est pas en l’ayant si peu fréquenté que l’on peut en cerner tous les tenants et les aboutissants.
De plus, l’ouvrage ne propose pas de solution et ne s’attarde guère à contrebalancer le propos en racontant des moments positifs, agréables, des heures de cours réussies… Ne me dites pas que cela n’existe pas. Non, c’est juste un énorme ras-le-bol - que je comprends tout à fait - qui s’exprime ici.
L’auteur appelle enfin à revaloriser la formation, la carrière et le métier d’enseignant. Mille fois d’accord. Mais comment ? Pas de piste ici non plus.
Que ce soit en France ou en Belgique, nous vivons la crise de plein fouet et les secteurs non marchands sont les laissés pour compte. Personne n’a - ou ne veut accorder – l’argent nécessaire à une redynamisation et une revalorisation du métier. De plus, les syndicats ont une influence énorme dans le processus des négociations mais ne défendent pas toujours les mêmes priorités que celles que voudraient voir défendre les enseignants. Enfin, personne n’a jamais la volonté d’écouter les profs, de leur demander leur avis, préférant s’en référer à des pédagogues de salon, des spécialistes de la théorie ayant peu ou pas d’expérience de terrain.
Le travail à faire est tellement monstrueux que personne n’a le courage de se lancer dans un chantier qui pourrait durer une décennie. Alors on pare juste au plus pressé.
Les enseignants ne découvriront pas grand-chose de neuf dans ce constat mais j’espère au moins que le livre sera lu par des parents et qu’ils comprendront un peu mieux le beau et difficile métier que nous faisons parfois.
Tags : prof, constat, enseignement
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Commentaires
J'ai plusieurs fois hésité à lire ce livre mais c'est encore replonger dans le milieu scolaire et renforcer mon ras-le-bol certainement. Je lirai plutôt celui de Daniel Pennac dont j'ai oublié le titre. Il est dans ma PAL.
Bon courage pour ces 6 semaines.
Il ne doit pas y avoir de problèmes pour se procurer "Nid de vipères" en librairie. Toutes les librairies ne travaillent pas avec Chloé des Lys mais tu dois pouvoir le trouver. Tu peux aussi le commander chez l'éditeur; tu auras 30% de réduction, en principe, mais ne sois pas pressée.
Je dois quand même te prévenir qu'il y a quelques fautes d'orthographe...
Bonne soirée.
J'ai lu ce livre à sa sortie et ne l'ai pas beaucoup aimé. Je le trouve caricatural et cela déssert le propos. Toutes les écoles en discrimination ne sont pas remplies de jeunes délinquants et il y a des jeunes formidables parmi les sections professionnelles. Je ne me suis pas du tout retrouvée dans ces récits. Je ne nie pas les problèmes mais j'ai peur d'un amalgame mal venu.
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Je n'ai pas lu ce livre et ne suis pas enseignante mais je suis fille d'enseignante et ne peux qu'être 100% d'accord avec tes réflexions Argali. Je suis admirative face aux profs, que la société ne cesse de dévaloriser !