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Oona et Salinger, Frédéric BEIGBEDER
«Il arrive toujours un moment où les hommes semblent attendre la catastrophe qui réglera leurs problèmes. Ces périodes sont généralement nommées : avant-guerres. Elles sont assez mal choisies pour tomber amoureux.
En 1940, à New York, un écrivain débutant nommé Jerry Salinger, 21 ans, rencontre Oona O’Neill, 15 ans, la fille du plus grand dramaturge américain. Leur idylle ne commencera vraiment que l’été suivant... quelques mois avant Pearl Harbor. Début 1942, Salinger est appelé pour combattre en Europe et Oona part tenter sa chance à Hollywood.
Ils ne se marièrent jamais et n’eurent aucun enfant.»Mon avis :
J’ai longtemps hésité à lire ce roman. Une amie a fini par me le prêter et je m’y suis plongée avec circonspection.
Je n’aime pas Beigbeder, cet homme superficiel, clubber hyperlooké et dévoyé qui aime choquer et faire l’apologie de la cocaïne, de la vodka ou encore de la prostitution. Depuis « Windows on the world » que j’avais beaucoup aimé, je n’ai plus retrouvé de plaisir à le lire. « 99 francs » m’est tombé des mains et « L’amour dure trois ans » également.
Surtout, j’ai du mal avec son narcissisme forcené qui le fait se mettre en scène à travers ses personnages de roman, lui qui a déclaré un jour à « Moustique » « J’adore parler de moi à la première personne, j’estime que ma vie est passionnante. »
On croit se plonger dans une histoire d’amour faite de passion et d’émotions intenses. On se rend vite compte que cette « histoire d’amour » est plutôt un flirt, un amour platonique que Beigbeder a décidé de voir comme décisive dans la vie de l’auteur. Un amour qui trouvera son apogée dans l’engagement de Salinger à la Seconde Guerre mondiale alors qu’Oona tergiverse, hésite et finit par rencontrer Chaplin. De 37 ans son ainé, il l’épouse et de leur histoire d’amour naitront huit enfants.
Salinger s’engage en 1942 et sa prise de conscience de l’horreur des camps est sans doute le passage le plus fort du récit.
S’il ne m’est pas tombé des mains, ce roman (qui ne commence vraiment qu’après une trentaine de pages) m’a vite agacée et j’avoue avoir sauté certains passages. Comme dans « Windows... » le récit alterne fiction et réalité, petite et grande histoire mais cela est moins pertinent, moins maitrisé ici. De plus, je ne vois pas l’intérêt d’insérer des remarques qui se veulent drôles mais sont d’une insipidité renversante. De même avec les invitations à se rendre sur Youtube, visionner des images qui corroborent ses dires. Est-ce cela la littérature ?
En fait, une fois de plus, ce récit sert à parler de Beigbeder. A travers ce récit, c’est encore lui qu’il met en scène, cherchant à légitimer sa propre histoire. Il faut attendre les dernières pages du roman pour comprendre à quel point les destins de Salinger et d’Oona sont liés, affectivement et intellectuellement, à celui de Frédéric Beigbeder. Oui, bon...
Bref, ce roman ne m’a pas réconciliée avec l’homme. Pas plus qu’avec le romancier dont le style m’apparait comme artificiel et mièvre au possible. Que de phrases creuses et de pensées vides. A éviter en cette rentrée.
Tags : Oona et Salinger, Beigbeder, rentrée littéraire 2014
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Commentaires
De lui, je n'ai lu que "Windows...", qui ne m'avait déjà pas totalement convaincue. Je passe donc mon tour.
3JacquelineJeudi 11 Septembre 2014 à 18:16Hihi ..... quel chouette billet ..... Je ne comptais pas lire cet ouvrage : le sujet ne m'intéresse pas .... et surtout, je n'apprécie ni l'écrivain (deux romans lus et pffff) ni "l'homme Beigbeder" ... :-)
4paikanneJeudi 11 Septembre 2014 à 18:33Jamais lu Beigbeder... et je n'avais pas l'intention de lire celui-ci. Qu'est-ce qui t'a poussée à le lire malgré tout ?
Lo ! Je n'ai jamais rien lu de Beigbeder et je pense que je vais en rester là. L'image que renvoie ce personnage m'insupporte, aucune envie d'avoir la confirmation par ses livres.10Asphodèle85Jeudi 11 Septembre 2014 à 23:20Je l'ai offert à un ami car il n'a rien contre Beigbeder (c'est plus simple que de dire ce qu'il lui trouve^^). Hormis un de ses livres listant les livres à avoir lus avec des chroniques qui m'avaient fait sourire, tous ses romans me sont tombés des mains avant la page 20, alors j'ai arrêté de me faire du mal, je ne le lis plus...
Tu as bien raison Aspho, il va rejoindre la liste de ceux qui ne susciteront plus ma curiosité.
"De même avec les invitations à se rendre sur Youtube, visionner des images qui corroborent ses dires. "
Ce ne serait pas le premier à renvoyer son lecteur à Internet (cf. "Cantique de la racaille 2" de Vincent Ravalec, par exemple) - quitte à prendre le risque qu'il reste scotché face à son écran d'ordi et abandonne le livre...
F. Beigbeder peut avoir des côtés énervants, mais là encore, je l'ai trouvé pertinent et (justement) maîtrisé - de même que "99 francs" est agaçant et obsédant - comme peut l'être une publicité bien réussie... J'ai en revanche trouvé "L'amour dure trois ans" insupportable; mais bon, c'est vieux...Je manque peut-être d'objectivité vu mon ressenti pour l'homme mais je ne vois pas l'intérêt de ce livre. Il ne sait rien de ces personnages du point de vue intime. Il s'est documenté certes mais ne les a jamais rencontrés, côtoyés et imagine quand même beaucoup de ce qu'aurait pu être leur liaison. Pour quoi ? Comparer à la sienne, légitimer son propre couple. Mouais.
16LaFéeVendredi 12 Septembre 2014 à 12:13L’hôpital? Mais que se passe-t-il?
Comme Cajou j'aime beaucoup ton billet. J'ai abandonné l’auteur depuis quelques années, j'ai pris le bonhomme en grippe mais je ne renie pas mon passé (lol) : j'ai adoré " l'amour dure trois ans" et " 99 francs", mais je pense que j'étais pile dans la bonne tranche d'âge à l'époque pour ces " nouveaux romanciers iconoclastes" ( faussement). J'aime toujours " Windows on the word" , surtout parce que c'est la première fois que j'étais confrontée à un auteur qui s’immisçait dans son récit. Le procédé est éculé maintenant, il m'agace, presque autant que le Bobo vieillissant qu'est devenu le ( un peu) beau Fred . bref, je suis ravie de lire que l'histoire n'a aucun intérêt, je peux passer mon chemin sans regret!
17apVendredi 12 Septembre 2014 à 14:21J'hésite aussi comme toi, tu as franchi le pas je ne suis pas sûre de le faire. Télérama en parle en disant "bonjour paresse" !!
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Je me suis régalée à lire ton billet, que j'ai trouvé très pertinent, sur Beigbeder et son oeuvre : même si je n'ai pas lu celui-ci, tout ce que tu dis est ce que j'avais pensé à la lecture de plusieurs de ses précédents ouvrages.