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Un thé dans la Toundra / Nipishapui nete mushuat, Joséphine BACON
Après Bâtons à message, Joséphine Bacon nous fait découvrir son territoire de manière plus marquée : la toundra. C’est une expédition où nous sommes guidés à vivre les moindres émotions que procure la toundra. La poésie nous permet d’entrer, de respirer la terre et de fouler ces espaces qui entrent en nous comme une grande prière. Par ce livre de poésie (innu & français), Joséphine Bacon confirme son talent de passeuse de la culture innue. Et cet imaginaire qui s’apprend à l’écoute des aînés et au miroir de la route.
Mon avis :
Après la lecture du roman d’Isabelle Bary, j’avais envie de prolonger un peu cette rencontre avec la culture innue. Je me suis donc plongée dans le recueil de Joséphine Bacon, acheté à la FLB. Poétesse amérindienne, née en 1947, elle fut arrachée à sa famille de nomades à l’âge de cinq ans, comme tant d’autres, pour être scolarisée en pensionnat. Enfant de la toundra, elle ne l’appréhendera réellement que près de 50 ans plus tard.
Une quarantaine de poèmes nous sont offerts en français et en innu-aimun, la langue maternelle de l’auteure. J’ai aimé avoir la possibilité de la lire même si je ne la comprends pas. J’ai trouvé sa sonorité et ses allitérations musicales et entrainantes.Nipimuteti J’ai marché
Nikapatati J’ai portagé
Nipimishkati J’ai pagayé
Tshetshi natshishkatan Pour te rencontrerCes courts textes reflètent toute la beauté de la nature et le respect de l’auteure pour cette Terre ancestrale. Par ce voyage réalisé en 1995, lors du premier rassemblement des ainés de toutes les communautés innues, elle rencontre la Toundra pour la première fois. Faisant connaissance avec le nomadisme, elle part à la chasse au caribou et contemple la ferveur des anciens, leur respect de la nature, des traditions et leur amour de cette horizon sauvage, brut, suspendu dans le temps et dans l’espace. Elle apprend à voir, à regarder, à toucher et à aimer.
Enfant de la Toundra
Résonne mon cœur
Ta musique, la rivière
Ta lumière, les étoiles
Ton tapis, le vert tendre du lichen
Je ne sais pas voler mais tu me portes
Ta vision dépasse le temps
Ce soir je n’ai plus mal
La ville ne m’enivre plusElle rend ici un bel hommage à ses origines, tentant de nous initier aux valeurs des siens, à leurs mythes et à la beauté de leur environnement. Nous retournons à l’essentiel à travers ses mots si lumineux et pourtant d’une grande simplicité. Comme une prière montante vers les Esprits des lieux.
Ce retour aux sources se matérialise dans les textes par un dialogue entre l’auteure et quelqu’un (tu) que je n’ai pas franchement identifié. Le chasseur qui l’initie, Ishkuateu-Shushep ? Un ancêtre ? Ou la petite fille qu’elle était ? Dans certains poèmes cela semble clair. Dans d’autres non.
Si vous goûtez la poésie, je ne peux que vous inviter à découvrir ce beau recueil ; cette marche dans la Toundra, sur les traces du passé.
Superbe.
Tags : Un thé dans la Toundra, littérature québécoise, poésie, Innus, chasse, Toundra, Bacon
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Commentaires
3jessy jamesMardi 2 Mai 2017 à 12:52Je lis peu de poésie. Mais j'aimerais par contre découvrir la vie des amérindiens. Je prends note des deux ouvrages cités.
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Je suis très contente de lire ton billet. J'ai assisté à une rencontre avec Joséphine Bacon et Laure Morali lors du Printemps des poètes il y a quelques années. J. Bacon m'a littéralement fascinée et enthousiasmée, il émane d'elle une très grande sérénité. J'avais acheté ce recueil à cette occasion et un autre Nous sommes tous des sauvages.
J'ai vraiment beaucoup aimé Un thé dans la toundra, j'ai des souvenirs de paysages immenses et sereins lorsque je repense à ces poèmes. Je les lisais dans les transports en commun et j'en oubliais totalement l'environnement autour de moi...
Merci pour ton message. Et pour "Mes os ont mal" que je viens de lire sur ton blog.
Beaucoup de pudeur, de sincérité, de respect dans ses mots. J'ai été très touchée aussi par ses textes.