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Brancusi contre Etats-Unis, Arnaud NEBBACHE
1927, un procès ubuesque se tient à New York. Avocats, témoins, expert et artistes débattent pour savoir si le travail de Constantin Brancusi doit être considéré comme de l’art ? En écho, à Paris, le sculpteur et ses contemporains doutent. Le travail de Brancusi est-il à la hauteur face au génie de l’artisanat et de l’industrie ? Le nouveau continent a-t-il les épaules pour jouer le rôle central dans l’art moderne que l’histoire lui impose désormais ?
Mon avis :
Constantin Brancusi, sculpteur roumain naturalisé français, du 19e siècle n’est pas très connu de monsieur Tout-le-Monde. Elève de Rodin, il fut pourtant l’un des plus influents du début du 20e siècle. Sa sculpture funéraire « Le Baiser », objet de controverse juridique, est au centre du roman éponyme de Sophie Brocas, chroniqué en 2019.
Cette fois, l’œuvre de l’artiste donne lieu à un album graphique aux éditions Dargaud. Il s’agit de raconter le procès intenté par Brancusi en 1927 aux douanes américaines pour faire reconnaitre le statut d’œuvre d’art à une de ses œuvres. « Oiseau dans l’espace » venait en effet d’être lourdement taxée à l’importation en tant qu’objet utilitaire. Les œuvres d’art étant, elles, exonérées.
Les questions qui sous-tendent le récit sont pertinentes et toujours d’actualité : Quels sont les critères pour juger de la notion d’œuvre d’art ? A quoi reconnait-on un artiste ? Qui est juge en la matière ?... Il est aussi question de la libre circulation des œuvres à l’époque.
J’ai vraiment apprécié cette plongée au cœur de ces préoccupations artistiques. La réflexion sur la place de l’art, sur les critères de jugement et le débat des artistes sur le sujet (Duchamp, Léger, Calder…). Arnaud Nebbache fait habillement ressortir les arguments des pour et des contre et montre les difficultés d’un jugement sans subjectivité quand il s’agit de définir le beau ou l’art.
Ce livre est un bel objet : couverture cartonnée épaisse d’un beau bleu et 128 pages de papier de qualité. Chaque unité de lieu est définie par une gamme de couleurs : ocre, bordeaux, bleu-vert pour les rues de Paris ; bleu cobalt, brique, beige et noir pour la salle du tribunal aux Etats-Unis… J’ai apprécié. De même que le récit impeccablement rythmé. J’ai, en revanche, été moins séduite par les dessins de l’artiste. Si le dynamisme de Brancusi est bien rendu par la multiplication des attitudes et postures de celui-ci, j’ai peu gouté les décors faits d’ébauches et de tâches de couleurs sans réel contour. Ceci n’est qu’un avis personnel et totalement subjectif ; d’autres y prendront certainement plaisir. Et cela n’a, en rien, gâché le plaisir de lecture.
Un sincère remerciement aux éditions Dargaud et à l’opération Masse critique pour cet envoi. L’album sort en libraire le 6 janvier. Plus que quelques jours à patienter.
Tags : Art, Brancusi, procès, histoire vraie
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