• Mes lectures

    Même si je lis beaucoup de littérature jeunesse afin de choisir les titres les plus appropriés à mes élèves, je lis aussi pour mon plaisir. Des romans surtout. Mais pas seulement.

    Derrière le mot roman se profilent des textes bien différents : romans de gare, romans épistolaires, romans policiers, romans réalistes, romans d'aventures... Le roman est pluriel et il existe donc de multiples raisons de s'y engouffrer.

    Le roman séduit, émeut ; il propose l'original, l'inattendu, l'éphémère, le sensuel, le hasard d'une rencontre, la violence des sentiments... Il permet de se trouver tour à tour dans la peau d'une empoisonneuse, d'un détective, d'une amoureuse, d'un aventurier, d'un dictateur... Il nous met en contact avec la complexité de nos propres vies et de celles des autres. Il nous renvoie à nous-mêmes tout en nous donnant à sortir de nous-mêmes. Il parle à notre coeur autant qu'à notre intelligence.

    Lire un roman c'est un peu prendre rendez-vous avec soi-même.

    Je conterai donc ici mes rendez-vous. Je partagerai mes coups de coeur et mes déplaisirs. Vous verrez, je suis une éclectique.

     

     

  • La femme qui fuit, Anaïs BARBEAU-LAVALETTEElle s'appelait Suzanne Meloche et était née en 1926 à Ottawa. Un jour, elle décida, d'une manière radicale, de suivre sa propre voie, abandonnant ses enfants. Afin de remonter le cours l'existence de cette grand-mère qu'elle n'a pas connue, Anaïs Barbeau-Lavalette a engagé une détective privée et écrit à partir des indices dégagés.
    Elle nous confie, à travers le portrait d'une femme explosive, restée en marge de l'histoire, une réflexion d'une intensité rare sur la liberté, la filiation et la création. Un texte en forme d'adresse, directe et sans fard, à celle qui blessa sa mère à jamais.
     

     

    Mon avis :

     

    Dois-je encore présenter Anaïs Barbeau-Lavalette ? Ma première lecture de cette auteure fut « Je voudrais qu’on m’efface », un récit glaçant dont je suis sortie bouleversée. Depuis, je la lis de temps à autre. J’ai un peu traîné à lire celui-ci qui est dans ma PAL depuis quelques années. Peut-être parce qu’il raconte l’histoire de sa grand-mère, plus sûrement parce qu’il a été encensé par les critiques et que je voulais les oublier pour me faire ma propre idée.

     

    Au nom de la liberté, une femme peut-elle abandonner ses enfants et suivre sa voie ? C’est la question qui sous-tend le récit de la vie de Suzanne, artiste, peintre, poétesse et insoumise.

    Anaïs Barbeau-Lavalette questionne sa grand-mère, Suzanne Meloche, dans une longue lettre qu’elle lui adresse, elle qui a abandonné sa mère, blessée pour toujours. L’histoire familiale se mêle à celle du Québec, au courant contestataire de l’époque dans le milieu artistique « Refus Global ». Cette femme à la recherche d’elle-même et de sa voie semble toujours insatisfaite. Sans doute est-elle née trop tôt, dans une société stricte faite de carcans et d’interdits, de mise à l’index et de d’exclusion.

     

    Cette histoire triste et émouvante est celle de l’auteure, de sa mère et de sa grand-mère. C’est aussi le fruit d’une enquête minutieuse pour découvrir la femme derrière l’artiste et combler les vides de l’absence. Une vie d’exception mais tellement d’égoïsme et d’indifférence que j’ai eu du mal à entrer en empathie avec elle. Mais peut-on vraiment se mettre à la place d’autrui un siècle plus tard ?

     

    Un roman puissant, un portrait de femme peint par une femme, lecture idéale en ce mois de mars.

     

     

     


     

     

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  • Ca brille encore, Bénédicte LOTOKOFille unique d’un père fou et d’une mère absente, Clotilde a trouvé dans sa chambre envahie de livres un abri à ses tourments. Livrée à elle-même depuis l’enfance par son père, blanc, issu d’une riche famille belge, Clotilde cherche, à travers la littérature, à combler le vide laissé par sa mère congolaise.

    Mais en ce début d’été, un coup de foudre la surprend et son équilibre vacille. Les Fragments d’un discours amoureux accompagnent sa dérive dans les rues de sa ville natale, Bruxelles.

     

    Mon avis :

     

    Clotilde est une jeune femme en souffrance : une enfance difficile entre une mère absente et un père malade mais aimant, une vie faite d’errance au sens propre et au sens figuré… Elle mène une vie sur le fil où rien n’est vraiment stable.

    Et partout présente, Bruxelles, sa ville, son roc, son phare. La seule chose qui la tienne debout. Clotilde la parcourt de long en large et décrit le trajet qu’elle suit. Elle dépeint les lieux et s’attache à retrouver dans son passé les souvenirs qui y sont attachés.

     

    Le premier roman de Bénédicte Lokoto est percutant et désenchanté. L’écriture de l’auteure est ciselée et directe. Son récit n’évacue aucune souffrance de son héroïne, de ses questionnements ou de ses insécurités. Abandonnée par sa mère retournée au Congo, elle est confrontée quotidiennement au passé colonial de la Belgique et l’envie de trouver ses racines. La littérature l’aide à trouver son équilibre.

    Clotilde est une femme d’aujourd’hui, parfois excessive, passant de l’énergie folle à la déprime profonde. Une jeune femme en recherche d’elle-même.
    Un premier roman prometteur.

     

     

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  • Seul le mensonge est vrai, Malik SAML’histoire commence dans le camp de Choucha en Tunisie. Nour y arrive un jour, seule. Observatrice, perpétuellement aux aguets, silencieuse, elle se méfie de tous. Dans le camp, cohabitent des migrants, venus de pays divers, des passeurs qui promettent monts et merveilles pour de l’argent ; des hommes qui font régner la terreur par la violence, la brutalité, les viols ; des soldats du HCR, mal payés, corrompus parfois ; un médecin de MSF, revenu de tout…

    Nour est originaire du Bénin. Elle rencontre assez tôt Loubna, une Syrienne, qui la tire d’un mauvais pas et l’aide à s’adapter. Loubna est rebelle, volontaire et dangereuse car elle prend des risques inconsidérés. Nour et Loubna c'est l'union du feu et de la glace.

    Tous ces êtres humains ne pensent qu’à fuir la guerre, la misère, la famine. Ils se retrouvent entasser dans des camps, sans confort, sans hygiène, sans nourriture parfois. Lampedusa est leur El Dorado. S’ils savaient…

     

    C’est un récit dur et édifiant que celui de Malik Sam. Un premier roman qui parle vrai, ne s’encombre pas de fioritures et nous raconte la vie de ces personnes telle qu’elle est. On comprendra le parcours de Nour de chapitre en chapitre, par petites touches révélant les informations sur son passé avec parcimonie. Elle veut fuir le rejet, la honte, l’humiliation. Elle veut pouvoir marcher la tête haute, ne plus subir et être qui elle est. On découvrira la réalité des camps, des affres du voyage vers la liberté… ou la mort et l’indifférence du monde pour ce qui se joue là-bas au loin. La vie de ces migrants n’est que violence, haine et épreuves et n'intéresse personne.

     

    J’ai aimé le style de l’auteur, ses phrases courtes, dures, tranchantes lorsqu’il raconte la rudesse des rapports humains et les scènes de violence. Ses métaphores, ses rondeurs quand il décrit un ciel étoilé ou la mer qui ondoie au soleil. Un style au service d’une histoire forte qui se lit en apnée et dont on est heureux de sortir vivant.

    Une lecture indispensable.

     

     

     

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  • Forrest Gump, Winston GROOM« Etre idiot, c’est pas un cadeau, vous pouvez me croire » dit Forrest Gump. Peut-être, mais cela ne l’empêche pas de devenir successivement star d’une équipe de football universitaire, héros de la guerre du Vietnam, fantastique joueur d’harmonica ou encore champion de ping-pong, et même astronaute pour la NASA. Tout au long de ces extraordinaires aventures, Forrest accumule les gaffes les plus retentissantes, observant la folie du monde avec l’ingénuité d’un enfant et une résilience hors du commun.

     

    Mon avis :

     

    « La vie c’est comme une boite de chocolat. On ne sait jamais sur quoi on va tomber. »

    Tout le monde connait cette phrase mythique tirée du film « Forrest Gump ».

    Avant d’être un film à succès, que tout le monde a vu une fois dans sa vie, « Forrest Gump » est un roman écrit par Winston Groom et publié en 1986 racontant la vie de son personnage éponyme qui traverse le XXe siècle en vivant tous les grands événements de celui-ci.

    Offert il y a quelques mois, j’ai eu envie de le sortir de ma PAL pour les congés de Noël. J’avais envie de bienveillance et de douceur.

     

    Il n’est pas aisé de plonger dans un roman après avoir vu le film (plusieurs fois) surtout quand on a adoré celui-ci. Il commence par l’enfance de Forrest au cœur de l’Alabama, ses années d’école, sa relation naissante avec Jenny et son incroyable rapidité à la course.

    Je ne vais pas vous en faire tout le résumé. Vous connaissez l’histoire comme moi.

     

    Ce que vous ignorez peut-être c’est que le film est cent fois meilleur que le livre. Oui, c’est rare. C’est souvent l’inverse qui se passe.

    L’histoire est émouvante et la vision du monde à travers les yeux d’un simple d’esprit est touchante et candide. Sur ce point, roman et film se rejoignent. Cependant, les personnages ont des caractères différents et les (més)aventures de Forrest ne sont pas les mêmes. De plus, plusieurs petites choses m’ont agacée : les tournures de langage répétitives, des longueurs (lors de la guerre du Vietnam notamment), des exagérations… qui font que j’ai trouvé par moment Forrest hyper agaçant. Je ne l’aurais jamais cru.

     

    Je suis contente d’avoir découvert le roman mais je vous assure, regardez le film, il est supérieur au livre. Zemeckis en a fait un petit chef d’œuvre, ne gardant que le meilleur et Tom Hanks a donné une âme à ce héros ingénu et hors normes.

     

    C’est tout ce que j’ai à dire avec ça.

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  • Astérix, L'iris blanc, FABCARO & D.CONRADLe Père Noël a eu la bonne idée de glisser ce dernier album d’Astérix sous le sapin. Rédigé par Fabcaro et dessiné par Didier Conrad, il est le quarantième de la série.

    Dans la lignée de Goscinny et Uderzo, il met en scène les valeureux Gaulois au prise avec des Romains démotivés, que César et ses généraux n’arrivent plus à envoyer au combat. Vicévertus arrive providentiellement et se fait fort de transmettre sa technique aux troupes pour les remotiver. Il s’agit de la méthode de « L’iris blanc » basée sur la pensée positive. Voir le bon côté des choses, rester calme et imperméable à la colère est la base de cette technique.

    Vicévertus a les traits de Bernard-Henry Lévy et sa philosophie est parfois tout aussi obscure. Très ancré, malgré l’époque romaine, dans le 21e siècle, l’humour est drôle à l’image de Fabcaro et les poncifs contemporains bien présents. Ainsi Lutèce est polluée, embouteillée et les habitants s’y ennuient, revenus de tout, alors que les provinciaux les envient pour la culture que l’on peut y trouver. Notamment au musée de Kébranlix qui expose Banskix, Botanskix Malevix et Andiouaros.

     

    J’ai beaucoup aimé cet album, tant pour le dessin de Didier Conrad qui a la virtuosité d’Uderzo que pour le scénario de Fabcaro qui reprend un principe de Goscinny : inviter un intrus qui vient perturber le quotidien du village gaulois.

    Un pastiche très réussi qui ne dénature pas l’œuvre originale et y intègre à merveille les calembours et les anachronismes ou encore les phénomènes de société, comme le faisait Goscinny.

    Un de meilleurs albums de ces dernières années.

     

     

     

     

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  • En 1920, en Virginie, naît une petite fille afro-américaine dont les cellules vont révolutionner l'histoire de la médecine sans que les manuels de biologie ne mentionnent sa véritable identité. A partir d'un prélèvement dont elle n'avait pas été informée, la plupart des laboratoires du monde entier vont travailler sur la lignée de ses cellules cancéreuses, les premières à pouvoir être cultivées indéfiniment in vitro. Cent ans plus tard, une journaliste se met en quête de sa trace, télescopant passé et présent, ségrégation raciale et désir de liberté... 

    Qui donc était Henrietta Lacks ?

     

    Mon avis :

     

    En 1931, Henrietta, 10 ans, est confiée à ses grands-parents après le décès de sa mère. Son père ne peut et ne veut s’occuper de ses dix enfants. Les grands-parents élèvent déjà leur petit-fils David, âgé de 15 ans.

     

    Virginie, années 50.

    Henrietta et David sont mariés. Elle avait 14 ans à la naissance de son premier enfant et vient de mettre au monde son cinquème à trente ans. Elle se plaint depuis des mois d’avoir le ventre qui brule. Elle sent une grosseur à l’entrée de son vagin.

    C’est l’époque de la ségrégation. Les lois Jim Crow interdisent aux cliniques de Blancs de soigner les Noirs. Henrietta hésite à se rendre à l’hôpital. C’est à 30km. Et les enfants ?

     

    Amérique, 2021.

    Une biologiste devenue journaliste scientifique mène l’enquête pour savoir qui se cache derrière les cellules HeLa qui ont permis de faire d’énormes progrès en matière de vaccin (contre la polio notamment). Ces cellules sont produites à raison de six mille milliards par semaine.

     

    Aliénor Debrocq nous propose ici une pièce de théâtre qui rend hommage à Henrietta Lacks. Atteinte d’un cancer de l’utérus, elle subit une biopsie dont elle n’est pas informée.

    Ses cellules vont être mises en culture in vitro (ce sont les premières) et étudiées dans les laboratoires du monde entier.

    Aliénor Debrocq imagine une journaliste qui, cent ans plus tard, cherche à savoir qui était cette femme qui a permis de sauver des milliers de vie.

    Ses cellules portent deux syllabes de son nom mais son identité a été occultée durant des décennies. Sa famille elle-même n’a été mise au courant que dans les années 70 et a décidé alors de demander des dommages et intérêts pour l’utilisation commerciale des cellules de leur aïeule. Ce n’est qu’en 2021 que l’OMS lui rendra un hommage public à Genève.

     

    Un texte court et dense qui met en lumière une jeune femme noire américaine qui (au-delà des progrès médicaux) a permis à de nombreux laboratoires de s’enrichir sans qu’elle-même ou sa famille ait reçu le moindre dédommagement. Il pose la question du respect de la vie privée et du droit des patients.

     

     

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  • Mercredi Addams, Icône gothique, Fleur HOPKINS-LOFERONÀ ses débuts, en 1944, dans les dessins que Charles Addams publie dans le New Yorker, Mercredi Addams n’est encore qu’une petite fille mélancolique aux longues tresses sombres dont les apparitions, aux côtés de son père, Gomez, ou de sa mère, Morticia, sont construites sur le décalage entre l’amour filial témoigné et le monde lugubre dans lequel évoluent ces insolites personnages. Au fil des décennies et des adaptations (films, dessins animés et séries à succès), Mercredi, tout en entrant dans l’adolescence, devient le membre le plus notable de la célèbre Famille Addams. Si son occupation préférée est de torturer son frère Pugsley, elle se démarque des autres protagonistes par son intelligence froide et calculatrice, sa déstabilisante maturité et son absence d’empathie qui en font, paradoxalement, un personnage attachant.

     

    Mon avis :

     

    Cet essai se centre sur le personnage de Mercredi, petite fille intelligente, sombre et mélancolique, sortie de l’imagination de Charles Addams, dessinateur connu pour son humour noir et ses personnages macabres. Fleur Hopkins-Loféron retrace l’évolution du personnage des cartoons de Charles Addams à la série de Netflix.

     

    Dès le départ, Charles a mis l’accent sur l’importance des liens familiaux qui unissent ses personnages. Mais Mercredi semble ne pas entrer dans ce cadre étant plus proche de son père que de sa mère. Et la série « Mercredi » a complexifié les relations entre mère et fille. Mercredi (comme beaucoup de fillettes) dit d’ailleurs à sa mère qu’elle ne veut pas lui ressembler. Selon l’auteur, ce sont les films des années 90 qui vont asseoir sa popularité, en raison du côté décalé de la jeune fille avec la famille traditionnelle américaine.

     

    L’ouvrage est très documenté, comme les autres titres de la collection que j’ai lus, et intéressant car il montre l’évolution du personnage à travers les années et les modes, sans dénaturer le travail initial du créateur. On voit que la famille Addams est un univers en constante extension et la série « Mercredi » est un nouveau chapitre de la vie de l’héroïne. Mercredi est une enfant qui en sait trop pour son âge devenue une icône de la pop culture et résonne avec l’époque actuelle.

     

    Cet ouvrage est agréable à lire et accessible à tous les lecteurs, fans de Mercredi, quel que soit leur âge. Mercredi est, en effet, un personnage intergénérationnel.

    Il est paru aux Impressions Nouvelles, maison d’édition belge.

     

     

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