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J'écris parce que je chante mal, Daniel H. RONDEAU
Ce matin, je roulais à 120 vers le travail. Rien ne pressait pourtant, mais la moto semblait avoir trouvé l’hiver très long.
Je suivais depuis quelques moments une de ces voitures-camions qu’on excuse par l’arrivée d’un enfant. Dans cette boite de tôle six cylindres, il y avait une gamine au sourire troué qui me regardait avec fascination. Je lui ai fait un salut de la main. Elle n’a pas répondu. Petite conne. Je lui ai donc fait une grimace. Elle s’est cachée jusqu’aux yeux derrière le dossier de la banquette, puis, sans prévenir, elle m’a tiré une balle avec son index. Bang !Mon avis :
Daniel Rondeau est professeur de français dans un collège anglophone de Montréal. Linguiste amoureux de la langue française, il excelle dans l’art de décrire des rencontres. Il nous propose dans ce recueil, plus de cinquante nouvelles minimalistes où, en mots choisis, il nous dépeint un moment suspendu dans la vie de ses personnages. Ces instantanés, écrits dans une langue superbe, créent en peu de mots un univers différent à chaque fois mais toujours décrit avec une belle sensibilité. Rien de commun, de plat, de niais dans ces scènes de vie ordinaire touchantes où en quelques phrases il saisit l’essentiel de l’atmosphère, du décor, de la situation. Il n’a pas son pareil pour toucher le cœur des relations humaines, le petit défaut, la blessure cachée, le moment de grâce... Surprise par la mélancolie que dégagent ces textes, j’ai pourtant pris plaisir à côtoyer les êtres solitaires qui les peuplent. Il faut beaucoup aimer l’humain pour en parler si bien en si peu de mots.
Daniel Rondeau joue et jongle avec les mots qu’il brode en phrases délicates telle une dentelle de Bruges. Outre cette langue poétique d’une grande finesse où affleure beaucoup de tendresse, j’ai aimé les situations décrites. Tant de tranches de vie où chacun peut se reconnaitre ou que l’on a vécues sans en percevoir la force dramatique ou drôle que Daniel Rondeau en retient, son regard bleu profond portant au-delà des apparences. Il nous offre ici des portraits magnifiques dans lesquels il a certainement glissé une part de lui-même.
Un recueil qui m’a touchée et auquel je reviendrai certainement. Je ne peux que vous encourager à lire à votre tour ce coup de cœur québécois paru en Belgique aux Editions Quadrature, car si Daniel Rondeau chante mal, il écrit magnifiquement bien.
Tags : J'écris parce que je chante mal, nouvelles, littérature québécoise, Daniel Rondeau, Foire du Livre de Bruxelles
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Commentaires
2PascaldJeudi 5 Mars 2015 à 11:36Zut alors. J'ai hésité à l'acheter puis j'ai choisi celui de Michel Fouassier. Ce sera pour une prochaine fois car tu me donnes envie de le découvrir.
4JacquelineJeudi 5 Mars 2015 à 16:42Je chante juste Alex, bien, je ne sais pas.
Oui, vraiment à déguster. J'ai pris huit jours pour le lire, juste pour le faire durer.J'ai moi aussi hâte de le découvrir. Le titre ne m'inspirait pas du tout, mais quelques pages feuilletées à la Foire ont suffi à me convaincre, de même que ton billet.
Il me tente pas mal ! Je l'ajoute dans ma liste de livres à lire ! :) Au passage super blog !
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ah! une bonne lecture qui remonte à 2010 pou moi! :)