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Le goût amer de l'abîme, Neal SHUSTERMAN
A priori, Caden Bosch est un adolescent de quinze ans ordinaire, qui invente des jeux vidéos avec ses meilleurs amis et veut faire partie de l’équipe d’athlétisme. Mais dans son esprit, il est aussi le passager d’un vaisseau lugubre voguant sur les mers déchaînées. Marchant seul et pieds nus dans les rues, craignant que ses camarades de classe ne veuillent le tuer, Caden se perd petit à petit entre hallucinations et réalité. Le début d’un long voyage au plus profond des abysses, au cœur de la schizophrénie où il risquerait bien de se noyer.
Mon avis :
Si le début est lent et déroutant, on comprend rapidement que l’auteur nous entraine au plus près de la réalité vécue par Caden qui voit son univers chavirer peu à peu. Deux récits se mêlent ici, celui d’un adolescent comme tant d’autres ayant une famille, des amis et une scolarité normale et un récit sombre et complexe où le narrateur semble vivre sur un navire où un étrange capitaine et son perroquet commande un équipage singulier.
Au fil de cette lecture croisée, on découvre les premiers symptômes de la maladie mentale qui affecte lentement Caden. Conscient que quelque chose ne va pas mais incapable de le comprendre ou de l’expliquer, il va lentement plonger dans un abîme noir désespérant. Déroutante pour lui, son affection l’est aussi pour ses proches qui mettent ces changements sur le compte de l’adolescence.
Confronté lui-même à la maladie de son fils, l’auteur a habilement décrit les altérations du comportement et de l’humeur du jeune Caden ainsi que les bouleversements familiaux qui en découlent. On assite impuissant à la dégradation de sa santé : insomnies, réactions incongrues, irritabilité alternant avec des coups de déprime et enfin troubles du raisonnement et angoisses irrationnelles qu’il tente de cacher à son entourage.
Le second récit, au cœur d’un bateau dans la tempête, est celui de son hospitalisation et des soins reçus. Si dans le premier, on le voit s’enfoncer peu à peu, dans le second on suit ses lents progrès vers la guérison. Car si la maladie ne s’en va jamais tout à fait, une rémission est pourtant possible.
Ce roman bouleversant et fort décrit avec tact et précision une maladie encore mal connue et dont les malades et leurs proches n’ont pas toujours conscience. Il témoigne aussi de l’importance cruciale de l’apport et du soutien de la famille qui, malgré les grandes difficultés et les bouleversements profonds vécus par tous joue un rôle capital dans la guérison du malade. Ce récit maîtrisé d’un bout à l’autre est réellement percutant.
Illustré par les dessins du fils de l’auteur réalisés à différentes étapes de sa maladie, ce roman troublant apporte un témoignage puissant et juste touchant au plus près la réalité. Je reste cependant dubitative sur l’âge de lecture conseillé aux ados ; 14 ans me semble jeune, étant donné leur méconnaissance de la schizophrénie et la dureté des faits.
Merci aux éditions Nathan pour cet envoi coup de cœur.
Tags : Rentrée, jeunesse, schizophrénie, symptômes, impact familial, récit de vie
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Commentaires
2pascalMardi 28 Août 2018 à 00:01Merci pour cette découverte. Ca m'intéresse beaucoup même si je ne suis pas sûr de le donner aux élèves.
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un thème dur! 14 ans parait en effet nécessiter un accompagnement à la lecture!
C'est aussi ce que je pense. D'autant que les récits croisés ne facilitent pas la lecture des faibles lecteurs.