• La fatigue du matériau, Marek SINDELKA

    La fatigue du matériau, Marek SINDELKADeux jeunes frères fuient clandestinement leur pays, après la disparition de leurs parents dans un bombardement. Ils arrivent ainsi séparément en Europe où ils ont prévu de se retrouver. Ce sont alors deux périples qu’entreprend le lecteur dans ce récit court, intense et haletant, au gré des épreuves que traversent les deux frères, dans l’espoir de se voir accorder un nouveau droit à l’existence. Il faut fuir et se cacher, trouver à manger, tenter de se repérer, avancer. Le monde se révèle à travers le prisme de l’angoisse, nous faisant vivre une véritable expérience physique et humaine.

     

    Mon avis :

     

    J’ai été contactée par le Centre Tchèque de Bruxelles qui me proposait la découverte de ce roman au titre intrigant « La fatigue du matériau ». Curieuse, j’ai accepté.

    Marek Sindelka a 37 ans et n’en est pas à sa première publication. Poésie, nouvelles et un premier roman « L’erreur » font de lui un auteur qui compte et a déjà été primé plusieurs fois. A peine traduit, ce roman-ci, paru en 2017 dans sa version originale, a reçu en 2018 le Cutting Edge Award pour le meilleur livre traduit.

    « La fatigue du matériau » est un roman ancré dans la situation géopolitique actuelle. Nous suivons deux frères, Amir et « le garçon » ; nomades et déracinés, ils tentent de survivre après avoir quitté leur communauté pour rejoindre l’Europe, où ils espèrent commencer une vie nouvelle. Nous suivons le parcours de chacun après que le plus âgé, Amir, se retrouve séparé de son frère. Après une première traversée clandestine réussie, il se prépare à une seconde qui doit le mener en Europe. Parallèlement, le plus jeune, jamais nommé, raconte son périple en plein hiver après avoir fugué d’un centre de rétention où il attendait depuis des mois.

    Ces deux récits s’inscrivent dans un cadre spatiotemporel différent (et non géolocalisé) et relatent deux parcours différents. Mais on retrouve en chacun les mêmes souffrances : la peur, la fatigue, la faim, le froid, la douleur et cette angoisse lancinante et permanente de savoir de quoi sera fait demain. L’un est isolé en pleine forêt à la recherche d’une zone d’habitation où se réfugier, l’autre est en pleine mer à la merci des éléments. Deux récits de force, de volonté surhumaine pour rester en vie, deux récits qui ne peuvent que susciter l’empathie et le respect pour toutes les souffrances endurées.

    L’écriture est vive, les phrases courtes, traduisant l’immédiateté, la vivacité de réaction nécessaire pour survivre. Les descriptions sont nombreuses, dans leur solitude, les frères observent ce qui les entoure. Mais ce qui m’a frappé, c’est la distance que l’auteur choisit de mettre entre ses personnages et le lecteur. J’ai eu la désagréable sensation d’être un voyeur observant deux êtres se débattant dans un monde violent et injuste sous le regard indifférent des autres, mieux nantis.

    Ce roman dur décrit la crise migratoire actuelle, crise politique qui ne grandit aucun état et crise humanitaire qui voit chaque jour périr des milliers de personnes. Un sujet sensible mais ô combien indispensable à traiter en ce moment.

    Merci aux éditions des Syrtes pour l’envoi de ce roman. Je ne peux que vous conseiller sa découverte.

     

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  • Commentaires

    1
    Mardi 4 Mai 2021 à 11:58
    Alex-Mot-à-Mots

    Merci à toi pour cette présentation enthousiaste.

      • Mardi 4 Mai 2021 à 18:17

        Ce fut une lecture intéressante. Dure mais intelligente.

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