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Les cahiers noirs de l'aliénistes. T2 "Le sang des prairies", Jacques COTE
Trois mois après avoir joint les rangs du 65e bataillon de Montréal, le capitaine Georges Villeneuve, assisté du lieutenant Bruno Lafontaine et du docteur Paré, entend la déposition sous serment de François Lépine, un interprète métis qui a survécu au massacre de Lac-à-la-Grenouille.
Villeneuve et ses hommes ont reçu l’ordre du général Strange de former une commission d’enquête afin d’identifier les cadavres et de retrouver la trace des auteurs de ce crime odieux, de jeunes guerriers cris que le gouvernement canadien croit sympathiques à la cause de Louis Riel. Or, Villeneuve, tout comme la majorité des soldats et officiers du 65e bataillon, considère Riel non comme un traître mais bien comme un héros de la Nation !
Si la vie militaire n’effraie pas le jeune homme de vingt-deux ans – ses gages lui permettront en plus de payer ses études de médecine –, ce qu’il voit des injustices commises par le pouvoir d’Ottawa à l’encontre des Indiens du Nord-Ouest, des Métis et de Louis Riel, demeurera gravé dans la mémoire du futur aliéniste.
Mon avis :
Après avoir dévoré le premier tome des aventures de Georges Villeneuve dans "Dans le quartier des agités», je poursuis ma découverte de la vie passionnante de ce héros. Nous remontons le temps dans ce deuxième tome et nous retrouvons quatre plus tôt.
Alors que Georges s’apprête à entreprendre des études de médecine, il est enrôlé par l’armée canadienne avec son jeune frère et intègre le 65e bataillon de Montréal. Leur mission est de combattre les indiens dans le Nord-Ouest du Canada et de mettre fin à la révolte des Métis. Villeneuve est aussi chargé de l’enquête sur le massacre du Lac-à-la-Grenouille. Or, tout comme Louis Riel, le chef Métis, il est francophone et doit se battre sous l’autorité d’un général Anglais contre un frère, dont la cause lui semble noble. Cela a de quoi lui poser un problème de conscience.
Jacques Côté nous emmène en voyage à travers le pays, aux côtés des troupes canadiennes. Parcours en train entrecoupé de longues marches où le matériel doit être porté (le chemin de fer n’est pas achevé, notamment en raison de l’opposition des tribus indiennes), ce voyage est très pénible pour les hommes. La faim, l’inconfort, la peur, le climat… rien ne leur est épargné.
Le futur docteur Villeneuve est décrit avec finesse et rien ne nous est caché de ses pensées contradictoires et de son caractère franc. Quant aux personnages secondaires, choisis avec soin pour mettre en évidence les diverses opinions de l’époque et la multiculturalité du peuple québécois, ils enrichissent l’histoire et donnent à voir à partir de quoi s’est forgée l’identité, la culture et l’âme québécoise.
Une fois encore, Jacques Côté nous offre un récit léché, précis, et une construction romanesque parfaite. Grâce à lui, nous découvrons les dessous cachés de ce massacre. Les révélations de François Lépine, interprète métis que Villeneuve interroge, nous éclairent sur les circonstances du drame qui compte parmi un des plus sombres de l’histoire canadienne. Nous comprenons aussi les causes, les enjeux qui ont amené ce drame et l’atmosphère de l’époque.
Magnifiquement bien documenté, le travail d’écriture est d’une précision historique incroyable. Fiction et histoire se mêlent avec bonheur pour nous faire revivre ce moment dramatique. L’écriture précise et maîtrisée de Jacques Côté nous plonge dans l’atmosphère d’alors et nous fait vivre ces événements d’une manière naturelle, je dirais presque pédagogique, tant les faits historiques s’imbriquent parfaitement au récit et à sa dynamique.
Comme le dit la 4e de couverture, ce roman relève à la fois du western, de l’intrigue policière et du roman historique et permet au lecteur de savourer une page de l’Histoire du Canada un peu oubliée.
Quant à Louis Riel, dont il est beaucoup question ici et que Georges Villeneuve rencontrera à la fin, je l’ai découvert plus longuement grâce à une BD qui raconte son histoire et j’en parlerai bientôt.
J’avais beaucoup aimé « Dans le quartier des agités », j’ai encore mieux aimé ce deuxième tome, passionnant.
Tags : Québec en novembre, révolte indienne, Métis, Louis RIel, Georges Villeneuve, guerre, armée, politique
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Commentaires
je n'ai toujours pas lu de jacques côté, mea culpa.
Là, je suis fatiguée, mais ce n'est pas un peu la culture manitobaine que ça a formé, même si ça eu un impact au Québec?
Je veux dire que les conflits de l'histoire du Canada, l'obligation faite aux francophones de combattre sous autorité anglaise et de participer à des conflits qui ne les concernaient pas, cela a laissé des traces et créé des animosités qui se sont manifestées longtemps après. Cela a donc forgé l'identité québécoise.