• Au-delà des barricades, Joan LINGARD"Voitures, autobus, véhicules blindés brûlés, amas de pavés arrachés, fil de fer barbelé enroulé pour former des barricades, tel est le bric-à-brac que l'on trouve aujourd'hui dans les rues de Belfast. Des soldats aux aguets, le doigt sur la gâchette de leur arme: hommes et femmes les observent avec vigilance tandis que les enfants jouent à la guerre ou se battent vraiment. Sadie et Kevin se turent. Le sujet était trop délicat à aborder, beaucoup trop délicat pour eux."

    Mon avis :

    Il est des livres qui vous marquent à l’adolescence sans bien savoir pourquoi. Une écriture, un thème, une phrase… et l’histoire reste gravée en vous. C’est le cas de ce roman que je viens de trouver dans les soldes d’une librairie de Tournai, à 1 euro.

    Paru dans les années 70 aux éditions Travelling Duculot, aujourd’hui défuntes, ce roman a été lu par des dizaines d’adolescents et il m’arrive encore de le proposer à mes étudiants. En lecture libre cette fois car il n’est plus édité et jusqu’ici je ne disposais que de mon exemplaire.

    La collection Travelling de Duculot a édité dès 1972, des romans jeunesse inédits, basés sur des problèmes d’actualité. Dans un langage accessible, ils ouvraient les yeux sur les réalités du monde, souvent cruelles : les conditions de vie des immigrés, le génocide indiens au Brésil, la guerre civile en Irlande… ou les difficultés de vie des adolescents : l’adoption, la fugue, les premiers émois sexuels, la misère, les problèmes familiaux… Précurseurs, ces romans l’étaient aussi dans le choix d’écrivains de talent qui proposaient aux jeunes des récits compréhensibles mais sur des sujets difficiles. Plusieurs générations de lecteurs ont grandi avec ces romans de Gil Lacq, France Bastia, Robert Newton Peck, Joan Lingard, Bernard Barokas, Pierre Coran, Luce Fillol et tant d’autres ?

    Pour en revenir à « Au-delà des barricades », il nous présente à travers l’histoire d’amour impossible de Sadie et Kevin, les raisons historiques et les antagonismes qui ont amené les Irlandais à se déchirer pendant des décennies. Nous suivons l’histoire de ces deux jeunes que tout oppose – milieu social, éducation, religion – et qui devront lutter contre tous pour tenter de sauvegarder cet amour naissant.  Si le conflit irlandais est aujourd’hui apaisé, à défaut d’être terminé, la violence dont le récit fait mention et les rapports de force sont encore vécus ailleurs, hélas. Ce récit pourrait en effet se dérouler en Israël, au Rwanda, en Inde, en Corée… dans n’importe quel pays victime de la guerre civile ou de l’affrontement de deux communautés.

    Ce roman permet d’aborder de nombreux thèmes comme la légitimité de la violence, la transmission des valeurs familiales, les conflits interreligieux, les guerres civiles et bien d’autres.

     Au-delà des barricades, Joan LINGARD

     

     

     

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  • Premier chagrin, Eva KAVIANSophie s'apprête à faire son premier baby-sitting. Quelle surprise lorsqu'elle découvre que c'est une grand-mère et non une jeune maman qui a posé l'annonce. A partir de ce moment, rien ne se passe comme prévu, et la vie de Sophie va en être bouleversée.

    Mon avis :

    Un magnifique roman qui évoque, sans lourdeur, la maladie et la mort. A travers la relation touchante de Sophie et Mouche, l’auteur nous entraine dans une réflexion rarement abordée en romans jeunesse. Avec franchise, elles parlent de la maladie qui affaiblit celui qui en est atteint et effraie ses proches ; de la mort qui arrive sans prévenir ou qui se fait attendre ; de la vie qu’on voudrait voir se prolonger encore un peu ; des liens familiaux qui parfois se distendent…

    L’émotion est bien présente mais pas larmoyante. On a le cœur qui serre mais l’humour et le caractère bien trempé des personnages sont là pour alléger la  tristesse, rendre la mort plus acceptable. En parler est nécessaire pour y faire face mais les adultes n’ont pas toujours les mots. Ce roman est donc précieux, en plus d’être beau.

     

     

     Premier chagrin, Eva KAVIANPremier chagrin, Eva KAVIAN

     

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  •  Dictionnaire insolite de la Belgique, Gérald BERCHE-NGÔOn connaît de la Belgique ses frites, ses chocolats, ses bières. On se moque souvent des Belges au travers de blagues un brin condescendantes. Or la Belgique est surtout un pays original, surprenant, où le savoir-vivre et le savoir-rire sont de rigueur. Vous en saurez plus sur l’entartage, JCVD, le sucre impalpable, le concours de chant de pinson ou encore sur des musées, tels que ceux du hochet, du slip ou du plastique, en vous plongeant dans ce dictionnaire décalé, parfois irrévérencieux, insolite dans le fond et dans la forme, souvent humoristique – une zwanze se trouve d’ailleurs dans ces pages !

    Mon avis :

    Dans la collection des dictionnaires insolites consacrés aux villes et pays du monde, ce dictionnaire écrit par un Français vivant à Bruxelles depuis 2005 vient de paraître il y a quelques mois. Tombé amoureux du pays et de ses habitants, il a compilé en quelques mois les mots, les phrases typiques qu’il découvrait chez ses interlocuteurs. On y trouve un foisonnement d’expressions belges – que le Belges n’imaginent pas toujours être une spécificité d’ailleurs. Chacune est illustrée d’un exemple et expliquée avec plus ou moins de sérieux. Elles sont poétiques ou savoureuses et montrent à quel point la langue française est riche et plurielle. Ce qui en fait d’ailleurs, sa richesse.

    Ce dictionnaire relève aussi nos curiosités culturelles et politiques, nos traditions et nos originalités. Ainsi, on y retrouve nos spécialités culinaires (boulets, mitraillettes, pistolets…), notre système politique complexe, notre ascenseur hydraulique pour bateaux, ou le brulage de petite culotte qui a beaucoup amusé l’auteur.

    Un dictionnaire que devrait se procurer tous nos amis d’outre Quiévrain afin de vraiment savourer notre littérature et sa richesse. Cela éviterait à certains de demander (comme je l’ai lu sur un blog) que nos ouvrages soient traduits en français !!!

    Je l'inscrirais illico au challenge Voisins-Voisines d'Anne, si c'était un roman !

      

     

     

     

     

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    « Je déteste les gens qui font semblant d’être parfaits et qui agissent comme si la vie était

    une machine bien huilée. »

      

    Ils dansent dans la tempête, Dominique Demers

      

    Marie-Lune recherche sa chienne, confiée par son père à la SPA il y a 3 ans. L’employée n’est pas très compréhensive. Comme tous les adultes qu’elle croisera dans sa vie d’ailleurs…

     

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  • Dernier tome de la trilogie de Marie-Lune, cet opus est encore plus grave que les autres.

    Trois ans se sont écoulés et la jeune femme s’est installée à Montréal. Mais elle n’est pas remise des bouleversements traversés à l’adolescence. Suivie par une psychologue, elle survit plutôt qu’elle ne vit quand une mauvaise nouvelle de plus lui parvient. Elle part alors se réfugier au lac Supérieur, la région qui l’a vue naître. Fortement ébranlée, elle est au bord de la rupture. Des sœurs cloîtrées la trouveront gisant près des chutes de la Boulée et la recueilleront jusqu’à son rétablissement.

    Sans révéler la fin, je peux quand même dire qu’après autant de malheurs, le livre se referme quand même sur une note d’espoir.

     

    Ce qui m’a le plus frappé dans cette trilogie c’est l’inconséquence des adultes qui entourent cette enfant. Malmenée par la vie, elle n’a jamais vraiment pu compter sur aucun pour l’épauler. Confrontée très jeune aux pires difficultés, elle a toujours dû prendre seule des décisions très lourdes pour une adolescente. Ce n’est qu’un roman, diront certains. Hélas, un roman très proche de ce que vivent certains jeunes que je côtoie.  

    Alors que la littérature nous parle plutôt des adulescents l’auteur traite des enfants avançant seul parmi ces adultes immatures. Dominique Demers semble aimer les sujets difficiles. La longue descente aux enfers de Marie-Lune et la rencontre qui lui permettra de faire le point n’est pas non plus un choix de facilité. Aborder le thème de la religion était un pari risqué. Pourtant, aujourd’hui comme hier, les jeunes se posent la même question du sens de la vie. Et même si la religion et la foi semblent taboues de nos jours, elles ont le mérite de proposer une réponse. A chacun de prendre ou de laisser. C’est ce que l’auteur semble dire : croyez en quelque chose, trouvez vos racines, donnez-vous un but. Rien de plus.

    Au final, cette trilogie qui a pourtant vingt ans est d’une terrible modernité. Faut-il s’en réjouir ? Ou regretter que les choses évoluent si peu ?

      

     

     

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  • Les grands sapins ne meurent pas, Dominique DEMERSLa tempête fait rage dans le cœur de Marie-Lune. À quinze ans, elle a vécu trop d’émotions en trop peu de temps. Heureusement, il y a Antoine. Lorsqu’elle plonge dans ses bras, elle a moins mal. Mais, un nouveau choc bouleverse sa vie et Marie-Lune doit prendre de graves décisions...

    Mon avis :

    Suite de « Un hiver de tourmente », ce 2e tome nous relate la suite des aventures de Marie-Lune. Après avoir perdu sa mère, elle doit affronter un nouveau passage difficile dans sa vie : elle est enceinte. A quinze ans à peine, c’est beaucoup d’émotions et de responsabilités. Elle devra choisir entre avorter ou le garder, l’élever ou le faire adopter. Antoine sera-t-il à ses côtés pour l’épauler ? Que d’épreuves pour cette adolescente !

    Une nouvelle fois, Dominique Demers nous plonge dans l’émotion. Impossible de retenir une larme devant tant de douleurs de vivre. Le personnage reste cohérent : Marie-Lune a mûri mais n’a pas encore guéri de la perte de sa mère. Elle se comporte tour à tour comme une femme déterminée et comme une petite fille apeurée. L’auteur ne porte aucun jugement, elle se fixe seulement sur le choix cornélien et la décision à prendre sans jamais s’apitoyer ou verser dans le mélo. C’est toute la force du livre.

    Bien loin des bluettes proposées aux ados d’habitude, ce livre atteint son but en leur parlant des choses difficiles qu’elles peuvent vivre. Une très belle suite.

      

      

    Les grands sapins ne meurent pas, Dominique DEMERSLes grands sapins ne meurent pas, Dominique DEMERSLes grands sapins ne meurent pas, Dominique DEMERS

     

     

     

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  • Miss Potter, Son imagination a conquis le monde, Chris NOONANA l’époque de l’Angleterre victorienne, Beatrix aurait seulement dû rêver d’un beau mariage, comme toutes les jeunes femmes de sa condition, mais elle s’intéressait à beaucoup trop de choses. La nature et les animaux la fascinaient, tout comme les sciences, le dessin et la peinture. Il n’aura fallu qu’une lettre illustrée pour que son destin bascule, il aura fallu tout son courage pour qu’elle puisse vivre, aimer et exister comme aucune femme avant elle. 

    Mon avis :

     

    J’ai découvert avec bonheur la vie de cet écrivain qui a bercé mon enfance par ses jolis dessins aux tons pastel : Peter Rabbit, Noisette l’Ecureuil ou Madame Trotte-Menu ont accompagné mes premiers pas en lecture. J’ignorais alors que la géniale créatrice de leurs aventures avait vécu dans la très stricte Angleterre victorienne ou elle était émancipée avant l’heure et devait passer pour une originale, à tout le moins. Soucieuse de sa liberté d’artiste, sa volonté d’indépendance était aussi inconcevable qu’inconvenante. Même si elle avait déjà une trentaine d’années.

     Ses dessins bucoliques, excentriques et naïfs ont malgré tout su séduire enfants et parents. Ses histoires, certes modestes, possèdent le ton juste, une langue parfaite et abordent des sujets et des sentiments gais ou tristes, n’esquivant pas les difficultés de la vie. Le tout publié dans un format de poche plus préhensible pour les enfants, une grande innovation pour l’époque. 

    Le film est beau, tant par les bons sentiments qu’il développe que par les merveilleux paysages de la campagne du nord de l’Angleterre qui lui servent de décor. Renée Zellweger est parfaite dans le rôle de Béatrix Potter, alliant force de caractère et douceur, détermination et candeur. Au côté d’Ewan Mc Gregor, elle porte le film par la grâce de son talent.

    Chris Noonan, réalisateur de Babe, sait parler à l’enfant qui reste en nous et nous faire entrer de plein pied dans une histoire qui nous tient éloignés des difficultés du quotidien. Il évite cependant l’écueil d’un film niais et nous montre avec simplicité et optimisme le bon côté des choses.

     Je ne peux que vous conseiller de plonger à pieds joints dans les dessins de Béatrix Potter pour savourer une heure trente de plaisir tout simple.

    Film de 2007

      

    La vraie Miss Potter

    Miss Potter, Son imagination a conquis le monde, Chris NOONAN

     

     

     

     

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