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Par argali le 24 Novembre 2014 à 00:00
Pour la 12e fois, la Foire du livre belge avait lieu ce week-end à Uccle. Cette année, le thème était « le pouvoir » et a servi, comme d’habitude, de fil rouge aux rencontres avec les auteurs et dessinateurs invités à ce salon.
D’horizons très différents, une soixantaine d’auteurs se sont déplacés pour présenter leurs publications et participer à des débats ou séances de dédicaces. Une occasion quasi unique de mettre en valeur des talents belges - aussi bien auteurs qu’éditeurs - et de se rendre compte des publications foisonnantes de notre pays en la matière.En visite ce dimanche, j’ai écouté avec intérêt l’intervention de Jacques Rifflet qui présentait son livre « L’islam dans tous ses états » et nous a expliqué les liens qu’Est et Ouest tissaient avec les pays du Moyen Orient, la plupart du temps pour des raisons économiques, ce qui les amène aussi à soutenir certains régimes non démocratiques. Laurence Van Yperseele nous a parlé des lettres de soldats de 14-18 qu’elle a récoltées et publiées en un recueil « Je serai fusillé demain ». Comme le titre l’indique, ces soldats allaient être fusillés quand ils ont écrit ces ultimes missives à leur famille. Outre l’émotion et les sentiments exprimés, ces lettres nous racontent les derniers moments de ces hommes et les raisons parfois surprenantes de leur arrestation et condamnation.
Georges Lebouc nous a parlé avec entrain de son ouvrage sur « Bruxelles occupée ou la vie quotidienne sous l’occupation allemande » qui évoque notamment l’attentat contre le bâtiment de la Gestapo avenue Louise. Attentat mené par un aviateur courageux et un peu kamikaze. Enfin, Evelyne Wilwerth nous a parlé avec tendresse de Bilal, Marlène, Raphaël... les personnages de son dernier recueil de nouvelles qui a pour décor le Bruxelles méconnu des ferrailleurs et déchetteries qui se pressent sur les rives du canal. Quatre rencontres-débats qui illustrent à elles seules la diversité de la littérature belge d’aujourd’hui.
Autre moment privilégié de ce salon, la longue discussion que j’ai partagée avec Valérie Cohen et Mathilde Alet, éditées toutes deux chez Luce Wilquin et dont les romans ont été chroniqués sur le blog. C’est toujours un plaisir de converser avec Valérie Cohen et ce le fut aussi de découvrir la jeune auteure de « Mon lapin », premier roman de Mathilde Alet. Un échange agréable et chaleureux à l’image de ces deux auteures.
J’espère que cette 12e édition, organisée par la librairie La Licorne et portée par Tamara Demblon, ne sera pas la dernière. Libraire et auteurs méritent qu’on les soutienne et qu’on les encourage à persévérer dans cette belle aventure.
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Par argali le 22 Mai 2014 à 00:00
Ce mardi, ma librairie recevait Luce Wilquin, l’éditrice, et trois de ses jeunes auteures : Geneviève Damas, Mélanie Chappuis et Aurélia Jane Lee. L’occasion de présenter ces trois écrivains aux clients de la librairie qui ne les connaitraient pas encore et de parler avec elles d’écriture et d’inspiration.
Vous avez chacune écrit des nouvelles et des romans. Qu’est-ce qui vous fait choisir l’un plutôt que l’autre ?
MC : Je publie des chroniques, pas vraiment des nouvelles, pour le journal suisse « Le Temps ». Chaque mardi, je me mets « Dans la tête de... » et j’imagine ce qu’une personnalité pourrait dire de l’actualité. Que ce soit Nicolas Sarkozy, Nabila, Grâce de Monaco...
GD : J’ai commencé par rédiger des nouvelles avant d’arriver au roman. Une nouvelle, c’est direct, comme un travelling avant. On montre un sujet et on laisse faire le lecteur, on le laisse imaginer la suite, réfléchir... Avec le roman, on accompagne le lecteur.
AJL : Dans mes écrits, j’aime jouer sur le rapport rêve-réalité et balader le lecteur entre les deux. Dans une nouvelle, on peut moins en jouer. L’art de la chute est plus difficile.
A propos de vos recueils de nouvelles, un thème revient dans chacun, sert de fil rouge aux nouvelles. Aurélia, pourquoi « l’amour et ses à côtés » chez toi ?
AJL : J’avais envie d’écrire sur l’amour mais il y a tellement de situations où ce n’est pas vraiment de l’amour mais qui valent quand même la peine d’en parler. Tous les chemins que nous empruntons nous approchent de l’amour mais on met parfois du temps à le découvrir. Il y a aussi beaucoup de charme dans l’ébauche d’une relation, dans le rêve d’un amour idéal... J’avais envie de parler de tout ça.
Commences-tu à écrire la fin ou le début ?
Par le début mais je sais où je vais, je sais vers quelle fin je me dirige. Je sais que je vais mener le lecteur en
bateau pour y arriver. Dans un roman par contre, je peux me laisser surprendre par la fin.
GD : Les nouvelles de mon recueil se sont échelonnées dans le temps puisqu’elles ont été écrites entre 2006 et 2013. Il n’y avait pas de thèmes annoncés mais à la relecture avec Luce, nous nous sommes rendu compte qu’il y avait un lien. J’ai perçu que dans chacune, je développais ce moment où tout bascule, où tout change. J’aime bien les gens et les histoires qui sortent des rails.
MC : Les chroniques sont rarement écrites par des écrivains, la plupart du temps, ce sont des journalistes qui les rédigent. Je me documente beaucoup avant de les écrire. Ce week-end, j’ai lu beaucoup de biographies et d’articles sur Grâce Kelly car je voulais la faire parler du film qui vient de sortir et je tenais à être exacte. Je ne les fais pas relire par les personnalités mais certains m’ont écrit en réagissant très positivement comme Alain Delon ou Nabila. Souvent les critiques viennent du public et non des personnes elles-mêmes. Mes chroniques sont assez politiques ; je me moque mais c’est toujours gentiment. Ce n’est pas mon avis que je donne mais celui de la personnalité que j’imagine réagir de telle ou telle façon. Je parle de ce qui me brûle de ce que j’ai envie de partager.
Geneviève, dans « Si tu passes la rivière » le titre est-il une menace ou un espoir ?
GD : Ce sont les deux à la suite l’une de l’autre. Dans de nombreux mythes (le paradis perdu, Barbe Bleu) on voit que l’homme se construit contre un interdit puis qu’à un moment le besoin de savoir est le plus fort. Au départ, l’interdit fait peur mais vient ensuite le moment où la peur doit être transcendée pour aller vers la connaissance.
Mon roman est un peu construit comme un roman policier. J’adore qu’un livre soit construit par dévoilement progressif. François parvient à la sublimation au fil du temps, à l’abstraction. Une fois qu’il sait lire, il devient capable d’appréhender le monde et sa solitude se peuple d’amis découverts dans les romans. On n’est jamais seul avec la littérature.
La rivière, c’est l’arbre de la connaissance.
« L’arbre à songes » est une grande histoire d’amour. Y a-t-il un prix à payer pour vivre cet amour ?
AJL : C’est la question que je me suis posée. Ce n’est pas si évident que l’amour entre Sauvane et Abel soit réussi. Ils ont pourtant tout pour mais... L’amour a besoin de nourriture pour s’épanouir or ils vivent en reclus, isolés. Amour et solitude ne vont pas l’un sans l’autre cependant. Un couple a besoin de s’isoler et chacun dans le couple a besoin d’un peu d’espace à lui. Abel est, semble, le plus seul des deux.
La nature joue un rôle important. L’arbre est une des clés du roman. Sauvane dit qu’il réalise les rêves, Abel n’y croit pas trop. Jusqu’à ce que... Il y a quatre personnes dans l’histoire et un 5e personnage : le jardin. Il a un rôle prépondérant. Et alors l’arbre devient symbole de résurrection.Dans « Maculée conception » Marie est mise en scène. C’est difficile de s’attaquer à un tel personnage.
MC : Cela ne m’a pas gênée. Elle s’est imposée comme une belle histoire de maternité. J’ai beaucoup travaillé sur ce livre. Je me suis documentée. Historienne de formation, j’ai écrit plusieurs scènes avec un égyptologue car cette partie de leur vie en Egypte est méconnue. Marie va rencontrer des thérapeutes, ces thérapeutes ont vraiment existé. En choisissant le personnage de Marie, je voulais voir ce qu’il y avait derrière l’icône. Comme en Suisse, la majeure partie ce sont des protestants, le livre a été bien accueilli. Il n’a pas causé de remous. Je ne cherchais pas à bousculer les dogmes mais à parler de féminité et de maternité à travers un personnage qui est LA représentation de la maternité.
Mélanie Chappuis nous lit alors des extraits de son roman, entrecoupés par des morceaux joués au violoncelle par Céline Chappuis, sa cousine. Un moment d'une réelle beauté.
La voix douce et chaude de Mélanie Chappuis m’emporte sur les pas de Maryam et je me rends compte qu’elle me parle d’un personnage bien différent de celui que j’ai rencontré dans ma lecture. Je n’ai pas mis le même ton dans sa voix et Maryam m’est apparue toute autre. Un roman à côté duquel je suis vraiment passée.
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Par argali le 2 Mars 2014 à 00:00
Une semaine après la Foire du Livre de Bruxelles, il est temps de mettre de l’ordre dans mes notes et mes souvenirs. Les rencontres-débats auxquelles j’ai assisté sur la Grande Guerre ont été riches en enseignement de toute sorte. L’article qui suit tente de rendre compte, le plus précisément possible, de l’une d’elles.
Dès la déclaration de guerre, de nombreuses productions littéraires ont vu le jour. Jamais une guerre n’avait alors suscité une telle quantité de littérature. Il faut dire qu’avant l’embrasement de l’Europe, de nombreux écrivains avaient alimenté le feu, en exaltant le nationalisme et le patriotisme comme Maurice Barrès par exemple. Les premières productions ont donc pris la forme de romans nationalistes et confiants. Puis vers 1917, une littérature pacifiste émergea avec Giono et Werth notamment et cela durera longtemps dans le siècle. On ne peut imaginer aujourd’hui une œuvre sur cette guerre qui ne montrerait pas son côté absurde.
Témoignage ou fiction ?Ce sont deux enjeux différents. Si les écrivains établis veulent garder leur statut, les « nouveaux » vont se servir de ce conflit pour émerger (Roland Dorgelès). Ces nouvelles plumes sensées décrire la réalité des tranchées et des combattants feront appel aux anciens combattants pour authentifier leurs propos. Sont-ils des écrivains fiables ?
L’activité littéraire dans les tranchées est telle (le courrier étant un moyen de garder le moral et le contact avec la famille) que dès la fin de 1914 on crée un bulletin des écrivains où paraissent chaque mois des récits sensés êtres rédigés au front. Certains articles sont aussi des sortes de commandes sociales pour la presse, des reportages bidon, cette pression a fait rédiger à certains, de petits fascicules, romans ou nouvelles sur des sujets précis.
Les auteurs qui cherchent à témoigner au début de la guerre ne deviennent pas célèbres car ces écrits ne sont pas alors considérés comme de la littérature.
Des points de vue divergents et compliqués vont alors s’opposer, certains jugeant que la littérature de guerre doit uniquement témoigner et donc relater des faits rigoureusement exacts. (comme chez Genevoix) D’autres affirmant qu’un écrivain peut articuler un discours littéraire en transformant ce qu’il a réellement vécu.De son côté, la littérature allemande est symptomatique. Les auteurs allemands, occupés en Belgique, peuvent changer de point de vue en cours de route. Ce sera le cas de Gottfried Benn, médecin militaire qui légitime la guerre tout en en étant profondément dégoûté. Il publie des textes proposant ces deux points de vue différents. A partir de 1922, les auteurs allemands veulent surtout écrire le traumatisme.
Côté anglais, ce sont essentiellement les auteurs pacifistes que l’on a retenu et les poètes des tranchées comme Siegfried Sassoon et Wilfred Owen qui ont influencé la mémoire collective. Ils deviennent même des personnages de fiction à leur tour.
En France, les écrivains de guerre n’ont jamais été intégrés à la « grande littérature ». On les enseignait juste pour le côté patriotique. On considérait qu’il valait mieux lire Proust ou Céline. D’ailleurs leurs noms sont quasi restés dans l’oubli.
De même en Allemagne, où la littérature pacifiste est minoritaire et n’a pas duré longtemps. Là, la littérature nationaliste et patriotique est la principale, comme celle d’Ernst Jünger.
Que pensent les Anciens Combattants de cette littérature ?
Nos Anciens Combattants ont surtout retenu les poètes et écrivains parus dans la revue « La Renaissance d’Occident », dirigée par Maurice Gauchez ou « La Revue Nationale » de Robert Merget. Ces revues avaient un souci d’intéresser le lecteur et d’être précis. On retiendra surtout « Jusqu’à l’Yser » de Max Deauville qui a « établi un tableau objectif de ce qu’un témoin des grands événements peut voir. » Tenant un carnet de route, notant les faits et décrivant les paysages et impressions, sans y ajouter de commentaires ou interprétations.
Chez les anglophones, les vétérans ne voyaient pas leur expérience comme racontée dans les livres, qui se limitent souvent à la vie des tranchées. Pour eux, la Guerre c’était aussi la camaraderie, la défense du pays et de la liberté, l’engagement… Valeurs souvent absentes des livres de l’époque.
Qu’en est-il de la littérature contemporaine ?
Xavier Hanotte : ma fascination, c’est le conflit. Il accélère tout ce qui est humain et inhumain dans l’homme. Le conflit est romanesque.
Je suis également perméable au génie du lieu. J’ai été fasciné par le paysage entre Ypres et la Somme. L’organisation de l’espace, du souvenir, la vibration des lieux et des temps… cela m’a permis de rentrer dans ce conflit à reculons, par un paysage, par les hommes ensuite. Je regrette les récits cérébraux désincarnés. J’aime les émotions, les récits incarnés.
« Derrière la colline » est un récit à la fois historique et intime.Le fait d’avoir grandi dans une région martyr, le souvenir perpétué par les aïeux… incitent aussi les écrivains d’aujourd’hui à raconter le conflit. Mais on peut aussi y ajouter la proximité des hommes durant cette guerre de position qui favorisent les récits relationnels et le besoin de montrer comment ce conflit détermina la suite du 20e siècle.
Claude Renard : « Les anges de Mons » est un roman graphique que j’ai réalisé avec Xavier Hanotte. La Fondation Mons 2015 lui a commandé ce récit inspiré d’une légende et je l’ai illustré. Il s’inspire de la Légende des Anges apparus aux soldats anglais avant la Bataille de Mons en août 1914. Alors qu’ils étaient inférieurs en nombre face aux Allemands, des anges seraient apparus dans le ciel du 23 août 1914 les aidant à repousser l’attaque avant de battre en retraite en limitant les pertes. J’ai réinterprété ces visions des soldats anglais. L’expression « Mons Angels » est restée en anglais et signifie une aide providentiel, tombée du ciel. La ville de Mons est très importante pour les Anglais car c’est là que sont tombés le premier et le dernier soldat anglais victimes de ce conflit.
Ajoutons aussi la série "Fritz Haber" de D.Vandermeulen, dont je ne parle pas ici.
De gauche à droite, Hubert Roland, Xavier Hanotte, P.Schoentjes (Univ.Gand), Philippe Beck (UCL), David Vandermeulen, Virginie Renard (UCL), Joseph Duhamel, Claude Renard.
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Par argali le 8 Février 2014 à 00:00
Ce jeudi, Valérie Cohen était l’invitée de ma librairie. Interviewée par une jeune professeur de littérature, elle venait présenter son roman « Alice et l’homme-perle » paru en janvier aux éditions Luce Wilquin.
Roman d’amour, d’amitié, de vie et de vieillesse, il nous conte la vie de sexagénaires pétillants, bien décidés à profiter de la vie.Valérie Cohen considère la soixantaine comme une période de vie intense. Pour elle, on est vieux le jour où l’on abandonne ses rêves. Et son personnage, Alice, est une incorrigible rêveuse.
On sent une vraie tendresse lorsqu’elle parle de ses personnages. Les sexagénaires d’aujourd’hui n’étant plus du tout ceux d’hier. Ils sont actifs, énergiques, ont un rapport au corps, au désir, à la vie que n’avaient pas nos grands-parents. Les magazines pour seniors l’ont bien compris même s’il existe une vraie dichotomie entre les articles parlant de voyages et de sexe et les publicités pour les sièges Stana, les vitamines ou les chaises pour baignoire.
Valérie Cohen a réussi à créer une ambiance chaleureuse et joyeuse lors de cette rencontre, exactement comme dans son livre. Parmi la trentaine de personnes venues l’écouter, un peu plus de la moitié avait lu son roman et l’avait aimé, hommes ou femmes. Une belle unanimité.
Si vous souhaitez faire sa connaissance, rendez-vous sur son site www.valeriecohen.be
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Par argali le 23 Octobre 2013 à 00:00
Brigitte Smajda était l’invitée du club ados hier soir.
Tunisienne, venue habiter en France à 8 ans, à la mort de son papa, elle est aujourd’hui professeur de littérature, écrivain et éditrice à l’Ecole des Loisirs, pour la section théâtre.
Je l’ai trouvée très dynamique, drôle et passionnée par ses métiers. Elle parle de tous avec beaucoup d’enthousiasme. Elle a expliqué ce qu’est le rôle d’une éditrice, comment on choisit les manuscrits qui seront publiés, comment on travaille avec les auteurs…Romane, du club ados, a introduit l’écrivain Brigitte Smajda en lisant un texte écrit par les grands ados. Un texte sous la forme d’un lipogramme reprenant certains titres de ses livres. J’ai découvert ce qu’était l’Oulipo et les lipogrammes.
Brigitte Smajda a écrit six livres pour adultes chez Actes Sud et une quarantaine de romans pour enfants et adolescents. Ils sont presque tous parus à l’Ecole des Loisirs. Elle s’inspire souvent de sa vie ou d’anecdotes vécues en classe pour trouver l’idée de ses romans. Elle nous a parlé longuement de son oncle Jo, le héros du « Cabanon de l’oncle Jo », un oncle qu’elle adorait et qui était silencieux. Une qualité rare chez les méditerranéens selon elle. Il vivait en HLM et avait eu l’idée de créer un jardin ouvrier sur le terrain vague au pied de son HLM. Il a été imité par d’autres habitants et ils se rassemblaient pour jardiner, parler, manger ensemble. C’est le sujet de son livre.
Elle nous a aussi raconté la naissance de « J’ai hâte de vieillir » et des 6 autres livres de cette série qui met en scène Marie et Samuel. Et nous a parlé de « Il faut sauver Saïd » qui mêle des souvenirs personnels et des souvenirs de ses élèves. C’est un roman qui a reçu de nombreux prix et qu’elle aime particulièrement.
J’ai vraiment aimé rencontrer cet écrivain et l’écouter parler. Elle a une voix chaude et grave et met à l’aise. Elle est sympathique et passionnée. C’était génial.
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Par argali le 12 Octobre 2013 à 00:00
Du 9 au 13 octobre a lieu « La Fureur de lire ». Cette manifestation qui existe depuis plus de vingt ans a pour objectif de valoriser les potentialités de la lecture ainsi que tous les acteurs de la chaine du livre : auteurs, éditeurs, libraires et bibliothécaires.
Dans le cadre de cette manifestation, la librairie Pax recevait cette semaine Léonor de Récondo, auteure de Pietra Viva.
Violoniste baroque, ayant débuté à 5 ans, elle écrit son premier roman en 2010.
Ce troisième roman est un des grands succès de la rentrée. Il met en scène Michel Ange. Nous sommes en 1505 et il a trente ans. Jules II vient d’être élu Pape. Artiste reconnu, Michel Ange sera appelé à réaliser son tombeau. Il part donc pour Carrare, chercher le marbre nécessaire à ce dernier.Pourquoi avoir choisi d’écrire un roman autour de Michel Ange ?
La littérature foisonne d’ouvrages sur Michel Ange. Mais il me parlait parce qu’il allait lui-même sur place, à Carrare pour choisir ses marbres. Il se confrontait à la matière, à la montagne.
A l’époque, le terme artiste n’était pas usité, on parlait plutôt d’artisan. On commençait en bas de l’échelle, on apprenait le métier et on montait lentement les échelons de la hiérarchie. On servait un maitre, parfois toute sa vie, préparant le travail, les toiles ou les sculptures pour le maître. Michel Ange a une vision de l’art bien différente. Il a forgé une autre vision de l’artiste, celle de quelqu’un qui avait quelque chose à dire, à exprimer à travers ses œuvres
Il est resté dans la mémoire collective comme l’Artiste avec un grand A.Beaucoup de faits évoqués dans votre roman sont avérés par la correspondance de Michel Ange et ses biographes. Comment arrive-t-on à faire la part des choses entre la réalité et la fiction quand on écrit ?
J’ai écrit ce livre parce que mon père est sculpteur et que j’ai passé beaucoup de temps dans les carrières de Carrare, un lieu magique et magnifique. Nous y allions en vacances et le café où nous aimions prendre un verre s’appelait « Le Michel Ange ». J
Michel Ange a visité les mêmes lieux, est allé à Carrare où il est resté six mois, vivant au rythme de la carrière. Il s’est confronté à la matière, à la rudesse du travail des carriers. C’était important pour moi.J’ai commencé par lire les biographies qui ont été rédigées de son vivant. C’est assez rare pour le souligner. Puis je me suis attaquée aux écrits postérieurs puis aux livres consacrés aux techniques de travail du marbre. Je me suis ensuite plongée dans l’écriture. Mais je ne suis pas historienne. Mon chemin est avant tout romanesque et fictionnel.
Plusieurs faits sont vrais mais ce qui m’intéresse, c’est davantage ce qui s’est passé en lui, ce que son voyage a changé. Il est parti abattu par la mort du jeune moine Andrea. Il passe ses soirées en solitaire, puis au fils des jours, il se laisse approcher, toucher. Pourquoi a-t-il changé de regard sur la vie, l’art, les autres ?Y a-t-il un lien entre le violon et l’écriture ?
Je ne peux pas écrire en musique, cela me distrait. Quand j’écris, je mets des boules quies. J Pourtant ces deux activités sont en moi, cohabitent.
J’aime le lien que la musique me procure avec les spectateurs lors des concerts. Après des heures de répétitions solitaires, il y a le travail d’équipe avec l’orchestre puis la rencontre avec le public. Il n’y a pas ce partage dans l’écriture qui est un acte solitaire. D’un autre côté, la musique est cadrée, codée, il y a des temps, des pauses, des accords à respecter, de la rigueur. L’écriture, elle, me donne une vraie liberté.J’écris parce que j’ai adoré lire. Ouvrir un livre et entrer dans son univers, c’est magique, unique. Je lis tout azimut et ne me sens pas d’une école particulière en écriture. J’essaie de ne pas tout maitriser. Je veux avant tout rester dans l’émotion.
Il m'a été permis de rencontrer une femme d'exception, intelligente, douce et simple. Un moment de plaisir, suspendu dans le temps...
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Par argali le 8 Juin 2013 à 05:00
Ce 5 juin, mon libraire a convié Valérie Tong Cuong à rencontrer ses lecteurs à L’Oiseau-Lire à Visé. N’ayant jamais lu ses livres – dont je connaissais cependant les titres – j’ai profité de l’occasion.
Après une carrière musicale et une en communication, elle fera de son loisir, l’écriture, son activité principale. En 2008, elle publie « Providence », en 2010 « L’ardoise magique » et en 2013 « L’atelier des miracles » trois des neuf romans parus à ce jour et qui traitent tous de sujets graves mettant en scène des personnes ayant du mal à se construire.
Dans chacun de ces trois romans, Valérie Tong Cuong s’attache à nous montrer comment la vie peut basculer d’un moment à l’autre. A travers divers personnages auxquels elle donne la parole tour à tour, elle développe le postulat que tout est toujours possible, que chaque rencontre faite a du sens et qu’on ne peut avancer seul. Quel que soit notre parcours, on a besoin d’au moins un regard bienveillant pour avancer, de quelqu’un qui va nous faire voir les choses différemment. La seule condition étant d’être capable de déverrouiller soi-même en soi ce qui peut entraver la rencontre.
Passionnée de neurosciences, elle lit régulièrement des comptes rendus d’études médicales sérieuses traitant des émotions, de la génétique du comportement ou de la perception sociale puis s’en inspire pour construire la trame de ses romans.
Chaque roman met en scène des personnes en souffrance, dont l’origine est en lien avec l’enfance, la famille. Elle est en effet persuadée que nous sommes façonnés par des blessures originelles, conscientes ou non dont la famille est très souvent le terreau. L’essentiel est de comprendre comment la souffrance à pris naissance, d’en être conscient pour se définir face à cela. Toute souffrance amenant aussi du positif, dans notre construction personnelle.
Une autre de ses certitudes est qu’à chaque décision que l’on prend, à chaque choix que l’on fait, on pose un acte qui aura un impact sur nous et sur les autres même si on ne le mesure pas au moment même.
Cette rencontre menée par Anne et Morgane a duré une heure trente puis Valérie Tong Cuong s’est aimablement prêtée à une séance de dédicaces, prenant le temps de discuter longuement avec chaque lecteur.
Une jolie rencontre et une belle découverte.
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