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Par argali le 4 Novembre 2024 à 00:00
Norbert erre dans une tête, là où toutes les idées non-réalisées sont entassées, avec les souvenirs et les angoisse existentielles. Il se révolte : il veut exister dans le monde ! Quand viendra son tour et quelle forme prendra sa vie ?
Mon avis :
On ne présente plus Marie Colot, auteure belge pour la jeunesse. Elle nous présente ici un album à lire dès 5 ans, joliment illustré par Arianna Simoncini, enseignante à Bruxelles et illustratrice.
Norbert a une apparence à la fois animale et végétale, informe, mais a tout des attitudes humaines. Il est de très mauvaise humeur et s’en prend à une interlocutrice qu’on ne voit pas. On comprend qu’il vit dans sa tête et exige qu’elle lui permette de s’évader pour vivre des aventures passionnantes.
Norbert est un neurone. Il explique aux enfants le processus créatif et le brainstorming d’idées qui habite tout créateur devant une page blanche.
L’illustratrice tente de matérialiser ce qui se passe dans le cerveau, le cheminement de la pensée… Que va-t-il arriver à Norbert une fois sorti de cette tête où il était enfermé ?
Le graphique est simple sans être simpliste, les tons pastel offrent un environnement doux alors que Norbert est noir, comme la mauvaise humeur. Il attire l’œil immédiatement et permet, si on est attentif, de belles découvertes.
Ce récit est plein d’humour et fourmille de référence à l’art. Les dessins collent parfaitement à l’histoire et permettront aux jeunes enfants d’entrer facilement dans ce monde de la création. Cet album original permettra à chaque lecteur, quel que soit son âge, d’y trouver du plaisir et de s’interroger. Les personnages loufoques sont parfaits dans ce monde onirique qui mène à une réflexion philosophique sans prise de tête.
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Par argali le 1 Novembre 2024 à 00:00
Dans cinq minutes, la cloche sonnera la fin de la récré. Parfois, sans broncher, elle reçoit un ballon dans le nez. Que le tir soit malintentionné ou mal cadré, elle fait mine de l’ignorer.
Elisa a douze ans.
Le décompte final a commencé : douze heures et vingt minutes avant sa libération anticipée.
Mon avis :
Mêlant extraits du journal intime d’Elisa et interventions d’un narrateur externe, ce tout petit opuscule d’une trentaine de page nous parle de harcèlement scolaire.
Pas de réseaux sociaux, de vidéos glauques, non. Juste de la méchanceté crasse infligée à une fillette de douze ans par des filles de sa classe qu’elle croyait ses copines. De la cruauté pure et dure, autant morale que physique.
Luce Caron ne s’encombre pas de fioritures. Son récit va droit au but et est d’une efficacité qui fait froid dans le dos. En trente petites pages, elle dresse la situation et dépeint les souffrances de la fillette avec justesse.
Mais ce qui choque le plus dans cette histoire, c’est la réaction de l’institution, que ce soit l’institutrice ou la directrice de l’école. Je ne peux croire que des adultes soient à ce point indifférents et aveugles et nient l’évidence. Enseignante moi-même, cela me choque terriblement. Depuis plus de dix ans, nous avons mis sur pied une cellule d’accompagnement des enfants harcelés. Dès que nous soupçonnons le harcèlement, nous dirigeons l’élève vers cette cellule formée de professeurs volontaires et formés. L’indifférence est pire encore que le problème.
L’intérêt de ce court récit est d’être abordable aux jeunes de 10 à 14 ans. Il peut être le point de départ d’une discussion sur le sujet pour libérer la parole. L’autrice vient également en classe sur demande.
Paru aux éditions Lamiroy, ce petit ouvrage ne coûte que 5 euros et devrait être mis entre toutes les mains.
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Par argali le 14 Août 2024 à 00:00
En cette fin de XXIe siècle, la loi des Dates de naissance régit l’accès aux métiers. Né en janvier, vous avez accès au métier de vos rêves : acteur, chanteur, politicien, tout est possible. Né en décembre, préparez vous à racler le fond de l’océan et à plonger les mains dans des algues gluantes ! Minöa et Silnëi sont sœurs jumelles, nées à quelques minutes d’intervalle la nuit du 31 décembre. La première à 23h58 et la seconde à 0h17 ! La tyrannie des Dates de naissance leur promet des destins radicalement différents, mais cela ne les empêche pas d’unir leurs forces pour combattre l’injustice et l’ordre établi, aidées par Kléano, le chanteur rebelle d’un groupe de rock…
Mon avis :
Ce système injuste et arbitraire à la base l’est d’autant plus pour ces deux sœurs nées à quelques minutes d’intervalle. Même si leurs parents les ont élevées de la même manière, elles n’auront jamais la même vie, les mêmes chances.
Minöa déteste ses études. La seule chose que la tient débout, en plus de sa famille, ce sont les énigmatiques messages qu’elle échange avec un garçon, N, dont elle ne sait rien. Ils parlent avenir, politique, changements, refont le monde, sachant qu’ils rêvent et que rien n’est possible. Un jour, elle se perd dans un quartier qu’elle ne connait pas et rencontre un chanteur de rock clandestin Kléano. Elle n’imagine pas à quel point sa vie va changer.
Malgré le jeune âge de l’auteure (18 ans à la sortie du livre en 2006) le récit est structuré et addictif et l’écriture maitrisée. Les ingrédients de la dystopie sont présents et fonctionnent : de jeunes héros intelligents, un monde liberticide, une loi inique et un combat à mener ainsi qu’une critique argumentée de la société. Le tout saupoudré d’un peu d’humour et de fraîcheur juvénile. Les personnages sont bien construits et on s’y attache rapidement.
Même si l’histoire manque de suspense, elle reste agréable et convaincante et même si la maison d’édition annonce qu’elle est abordable dès 11 ans, je pense que l’idéal serait de la lire au 1er degré ou 2e degré professionnel. Les allusions socio politiques seront plus accessibles à des plus grands.
Un roman sympa et idéal pour aborder la dystopie.
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Par argali le 18 Juillet 2024 à 00:00
Des manifestations de liesse populaire ont lieu dans tout le pays : le Parti de la Liberté a gagné les élections... Mais, très vite, le nouveau pouvoir exclut tous ceux qui s’éloignent un tant soit peu de la norme - les « mal-habillés », les « trop-fonçés », les « pas assez-valides »...- et instaure des règles de plus en plus contraignantes : une heure de lever obligatoire pour tous, des jours de congés fixes, des choses que l’on ne peut pas dire, faire, manger ou porter... La liste des nouvelles lois et prohibitions s’allonge, les contrevenants sont traqués et des caméras de surveillance sont installées dans certains domiciles. Comment en est-on arrivé là ?
Mon avis :
Paru en 2012, ce roman écrit à 7 mains est une dystopie qui se déroule dans un futur proche. Pensant voter pour un avenir meilleur, les habitants de cette région vont vite se rendre compte qu’ils ont laissé le loup entrer dans la bergerie. Très vite, les lois liberticides se succèdent et le quotidien de sept familles est bouleversé.
Alice édition a réédité cet ouvrage dans sa collection de poche. J'en ai profité pour le relire.
Sept autrices ont rédigé ce court récit d’anticipation, préfacé par Stéphane Hessel ; un chapitre chacune. Et malgré un changement de style légèrement perceptible, le tout est très cohérent et agréable à lire.
Il décrit à travers sept familles l’arrivée au pouvoir du « Parti de la Liberté ». Chaque chapitre présente une facette de la politique extrémiste de ce parti arrivé progressivement au pouvoir après avoir séduit en douceur les électeurs. Il met en exergue l’importance de lire les programmes politiques et d’aller voter. Il parle également de racisme, de xénophobe et d’homophobie. Parfois à la limite de la caricature, il a le mérite de poser de bonnes questions et d’éveiller les consciences. Il montre de façon très réaliste l’instauration d’une dictature et l’arrivée de la suspicion et de la délation.
Electeurs de demain, les jeunes lecteurs découvrent les dessous de la politique et les annonces trop alléchantes qui préparent des lendemains qui déchantent. Mieux vaut donc agir avant et s’interroger, s’engager avant qu’ils ne soient trop tard. Les jeunes sont la conscience politique de demain et ce texte engagé s’adresse à eux, dès 11 ans selon moi. Idéal pour un premier degré ou un D2 professionnel.
Anne-Gaëlle Balpe, Sandrine Beau, Clémentine Beauvais, Annelise Heurtier, Agnès Laroche, fanny Robin Séverine Vidal
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Par argali le 8 Avril 2024 à 00:00
Une fête foraine, une grande roue et la vie qui défile...
Zoé a avalé une importante dose de médicaments et attend qu'ils fassent effet dans la cabine de la grande roue où elle a trouvé refuge. Lui reviennent alors tous les événements de sa vie qui l'ont conduite à cette tentative de suicide...
Mon avis :
L’adolescence est une période à la fois enthousiasmante et fragile durant laquelle les jeunes passent par diverses émotions qui soufflent le chaud et le froid. C’est ce dont parle ce court récit de Sylvie Allouche qui, pour la collection Court Toujours de Nathan, fait une petite infidélité à Syros.
Le récit commence le jour des 16 ans de Zoé. Elle va mal et a avalé des médicaments. Alors que son esprit s’embrume, elle revoit par flash-back les événements des dernières années. Son monde a changé le jour où ses parents ont divorcé. Elle avait alors douze ans et a vu voler en éclats tout ce en quoi elle croyait.
Dans son délire, elle aperçoit une petite fille qui lui ressemble beaucoup quand elle était enfant et la surnomme Rose. Par ses interventions, Rose parviendra-t-elle à la maintenir en vie malgré elle ?
Vous l’avez compris, ce récit tient en haleine jusqu’au bout. Comment Zoé en est-elle arrivée là ? Quel est l’événement de trop qui l'a fait flancher ? La fin est-elle inéluctable ?
Ce récit m’a beaucoup touchée car il fait écho à des histoires vécues par certains de mes élèves. D’ailleurs, tous les romans de Sylvie Allouche ont des accents de vérité et les jeunes ne s’y trompent pas. Celui-ci rappelle qu’il ne faut pas minimiser la souffrance des ados ni les traiter trop vite comme des adultes responsables. Ils sont plus fragiles qu’on ne croit. Même si elle a fait bonne figure longtemps, Zoé est fragilisée par plusieurs événements. Un de plus, un de trop et elle bascule. Ce récit interpelle les adultes dont je suis.
Un récit intense, concentré sur peu de pages, qui devrait trouver son public une fois encore.
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Par argali le 7 Novembre 2023 à 20:00
À treize ans, Arthur connaît à peine son père, qui se fait appeler Jim et n’est présent dans son existence qu’en coup de vent. Alors, quand Jim propose d’emmener Arthur et sa sœur en week-end à Bruxelles, l’occasion est trop belle de pouvoir enfin lever un peu le voile sur son passé mystérieux et de nouer des liens jusqu’alors distendus. Mais à peine arrivés là-bas, Jim laisse Arthur et sa sœur tout seuls à l’hôtel et il disparaît, happé par son ancienne vie, à la recherche d’un certain Alex. Essayer de le retrouver dans la ville inconnue, c’est se mettre en quête d’un lieu imaginaire, merveilleux, où tout serait comme neuf, comme la mythique cité de Shangri-La.
Mon avis :
Quand Jim, père absent et peu affectueux, propose à ses enfants Arthur et Lorraine de les emmener en week-end à Bruxelles, c’est la fête. Leur mère est moins enthousiaste connaissant l’apôtre mais laisse faire. Jim voit si peu ses enfants.
Après trois heures de car, les petits Parisiens arrivent à Bruxelles. La visite de la ville, de la Grand’Place et des bâtiments anciens n’est pas vraiment du goût d’Arthur 13 ans mais sa sœur de 7 ans semble s’amuser et il ne veut pas gâcher sa joie. Même si son père fait des blagues lourdes et n’est pas très au clair avec ses intentions.
Rentrés à l’hôtel pour se changer avant d’aller au restaurant, Arthur s’endort. A son réveil, il est tard et son père n’est pas là. Sa sœur a faim. Il appelle son père qui s’excuse. Sa course a duré plus de temps que prévu. Mais il va rentrer.
S’enchainent alors pour les deux enfants des péripéties inattendues et effrayantes pour leur âge d’autant qu’ils sont dans une ville qu’ils ne connaissent pas. Pour faire face, Arthur trouve la force dans son imaginaire et la ville de Shangri-La qu’il a rencontrée dans un de ses jeux vidéo. Une ville où le temps s’est arrêté.
Parue dans la collection Médium de L’école des loisirs, l’histoire imaginée par Patrick Delperdange est angoissante. Une nuit s’écoule qui n’épargnera rien à Arthur. Bien que mûr pour son âge, il n’est pas forcément armé pour traverser ce qui l’attend accompagné d’une fillette naïve et spontanée de 7 ans.
Le suspense nous entraine de page en page laissant parfois le lecteur dubitatif face à l’inconscience de ce père fantasque. Quant aux autres adultes du récit, ils ne sont pas en reste côté défaillance. Arthur, héros malgré lui, est un personnage lumineux et attachant. Comme souvent dans les romans de cet auteur.
Patrick Delperdange est un écrivain belge, auteur d’une soixantaine de romans. Plutôt connu pour ses romans noirs, il signe aussi des romans jeunesse dont « Comme une bombe » de 1985 et réédité plusieurs fois ou « La beauté Louise » de 2001. Son univers est unique, parfois glauque, parfois pétillant mais toujours dans l’humour… caustique.
C’est un plaisir de le lire car il ne ressemble à aucun autre. Il est unique.
Et si vous profitiez de ce mois belge pour le lire ?
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Par argali le 1 Novembre 2023 à 00:00
Une jeune fille, Jodie, vient de perdre la mémoire lors d'un accident de voiture. Son médecin lui suggère de retourner dans son village natal auprès de sa grand-mère, avec qui elle entretenait depuis 5 ans une correspondance régulière, afin de retrouver ses souvenirs…
Mon avis :
J’ai découvert cette bande dessinée dans le cadre de l’opération « Lisez-vous le belge ? ». Tangi, le dessinateur est issu de St Luc et Christian Lallemand est éditeur aux éditions du Tiroir.
Jodie perd la mémoire lors d’un accident de voiture et son médecin l’envoie dans son village natal auprès de sa grand-mère pour retrouver ses souvenirs. Hélas, la vieille dame décède peu avant son arrivée et Jodie se retrouve livrée à elle-même, dans un village où tout le monde la connait alors qu’elle ne reconnait personne.
Le rythme est agréable et l’enquête que mène Jodie est cadencée par plusieurs péripéties et découvertes que fait la jeune fille. Le scénario explore un panel de sentiments : empathie, amitié, jalousie… et développe des thèmes sérieux sans lourdeur.
Tangi illustre ce scénario en harmonie avec l’ambiance et ces décors cadrés avec soin sont dynamiques et d’une grande précision. En revanche, je n’ai pas trop apprécié les visages, trop taillés au couteau.
Cette lecture est agréable et le suspens intéressant. La fin est inattendue et m'a plu mais je sais déjà que mes élèves seront dubitatifs. Je pense que je vais leur demander d’imaginer une autre fin.
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